Interview de Me. Alexandra Gattino-Pollicott
Avocat au Barreau de Paris – Gattino Avocats
Docteur en droit
Responsable pédagogique du Mastère Spécialisé Droit des Affaires Internationales et Management – ESSEC Business School
Vous êtes responsable pédagogique du MS DAIM à l’ESSEC, qu’est-ce qui vous a poussé à en prendre la direction ?
Arrivée à la Direction du MS DAIM en 2012, j’ai d’abord été séduite par l’esprit avant-gardiste et visionnaire de cette formation spécialisée à la fois en droit des affaires internationales et en management. Créée en 1992, avant toutes les autres formations concurrentes, le programme arrivait à maturité. Issue d’une culture hybride avec une bonne connaissance des enjeux business et juridico-financiers notamment à l’export (ancienne D.A.F en entreprise), et forte de mon parcours académique (LL.M, doctorat en droit), le challenge m’a immédiatement inspiré avant de m’aspirer ! J’ai eu l’opportunité d’insuffler diverses innovations pédagogiques, de renforcer notre coopération avec des partenaires professionnels historiques (White & Case, EY Law, BNP, L’Oréal …) ou académiques (King’s College London), tout en ajustant la maquette pédagogique au plus près des besoins des recruteurs (création d’un cours en marketing, business & human rights, lobbying, de séminaires interactifs, de conférences-débats, d’une journée « métiers du droit » etc.). Par ailleurs, cette responsabilité pédagogique est complémentaire à mon métier d’avocat dans la mesure où il me permet d’être en prise directe avec les besoins et tendances du marché des professionnels du droit.
Il y a beaucoup d’avocats qui sortent des écoles chaque année, quels sont vos conseils pour les étudiants qui veulent se différencier des autres ?
Je formulerai 4 recommandations :
1 – Diversifier leurs expériences et ne pas se spécialiser trop tôt. J’encourage d’abord mes étudiants à effectuer des stages dès la L3. Diversifier leurs premières expériences professionnelles leur permettra de mieux s’orienter par la suite, et de ne pas se spécialiser avant d’avoir découvert le spectre de leurs potentialités.
2 – Effectuer une partie de leur cursus à l’étranger (par exemple : programmes LL.M.) et renforcer leur parfaite maitrise de la langue anglaise, seule langue des affaires.
3 – Renforcer leur culture générale et notamment leur culture économique et financière.
4 – Mettre en valeur leurs qualités personnelles et leurs valeurs professionnelles, qui sont des indicateurs forts de leur ouverture d’esprit. Par exemple, la cohérence de leur projet professionnel, leur niveau de détermination et de maturité pour atteindre leurs objectifs doivent être explicites. Face à des profils similaires, la différence tiendra à la personnalité du candidat, incluant ses passions, ses centres d’intérêts et ses activités extra-universitaires.
Le MS DAIM propose de donner aux étudiants en droit une solide formation en management. Mais concrètement, avec quel bagage sort-on de l’école ?
Le programme est centré sur les interactions entre le droit international des affaires et les domaines fonctionnels tels que la gestion d’entreprise : finance d’entreprise, comptabilité, marketing, management stratégique, négociation, prise de parole, communication digitale etc. le but étant de permettre aux étudiants de mieux conseiller leurs clients entrepreneurs ou d’interagir avec efficacité au sein des services transverses d’une entreprise. Ce Mastère Spécialisé donne une vision de l’ensemble des fonctions de l’entreprise et permet aux juristes de sortir de leur spécialité. L’avocat ou le juriste d’affaires se positionne désormais en véritable bras droit d’une direction stratégique. Ma vision est donc celle d’adapter le programme en fonction de ces besoins recensés, par une analyse « de terrain » des besoins des professionnels du droit à l’heure de la digitalisation. L’étudiant qui sera formé au sein du MS DAIM saura déchiffrer un bilan d’entreprise, il saura communiquer ses idées, préparer une présentation orale destinée à des opérationnels non juristes, travaillera son esprit de synthèse, saura convaincre et posséder des compétences interdisciplinaires pour répondre à des problématiques modernes et transverses. Il saura comprendre le travail d’un responsable marketing ou d’un chef produit. Il saura négocier ou régler des conflits de marques liés au management d’un portefeuille de titres de propriété industrielle ou retravailler les clauses d’un contrat de distribution international dans l’intérêt de son client. Il saura également faire preuve de créativité et d’humilité, deux valeurs qui me sont particulièrement chères.
Est-ce à dire que ne pas avoir de double-compétence est un point noir sur un CV aujourd’hui ?
Un très bon juriste, qu’il ait ou non une double (voire triple !) formation, a de bonnes chances de trouver un emploi satisfaisant après son stage EFB ou à l’issue de son Master 2. Pour autant, dans un secteur de plus en plus concurrentiel, les recruteurs se trouvent face à des profils bien plus performants qu’hier (MS, LL.M., double barreau, maîtrise de plusieurs langues étrangères sont des exemples évocateurs). Leur niveau de curiosité et d’excellence s’est accru. Les avocats associés des grands cabinets internationaux n’avaient pas besoin d’une double formation pour atteindre cet objectif. Les étudiants sont plus érudits aujourd’hui qu’ils ne l’étaient hier, plus rapides, plus connectés. L’hypertrophie des diplômes est un fait. Les étudiants doivent se préparer à multiplier les expériences académiques et professionnelles exigeantes pour intégrer des structures à leur image. A l’ESSEC, nous les accompagnons à cette fin.
Comment se différencie le MS DAIM des autres MS juridiques en France ?
Au-delà du contenu du cursus et de la très grande qualité du corps professoral de l’ESSEC Grande Ecole dont bénéficient les étudiants en Mastère Spécialisé, l’alternance du programme en apprentissage est un point différenciant fort. Il permet aux étudiants d’associer la théorie à la pratique, soit en effectuant un stage soit en étant apprentis (en entreprises, banques ou cabinets) à raison de 2 jours par semaine pendant 3 mois, puis à temps plein pendant 9 mois. Hormis l’apprentissage, d’autres critères différencient le MS DAIM de l’ESSEC des MS concurrents :
- Les cours sont dispensés à 50% en anglais et à 70% à la rentrée 2016-2017 ;
- Le programme bénéficie d’une participation exceptionnelle pour une école de commerce au célèbre « Vis Moot international arbitration competition». Il s’agit d’un concours d’arbitrage international qui a lieu chaque année à Vienne et qui permet à un nombre sélectionné d’étudiants d’être coachés par le cabinet White & Case toute l’année. Les étudiants plaident ensuite face à des étudiants venus de prestigieuses universités du monde entier. Travail de groupe, exigence, proactivité et interactivité ont la primeur ;
- Ce programme est proposé en double diplôme avec l’école de droit de King’s College London, classée numéro 1 au Royaume-Uni. Les étudiants peuvent terminer leur cursus en préparant une année d’études à Londres et en sélectionnant un LL.M. de leur choix parmi 8 spécialités ;
- Nous jouissons également d’un partenariat professionnel avec le cabinet Clifford Chance Paris qui sélectionne chaque année nos étudiants en stage ou en apprentissage de façon privilégiée ;
- Les étudiants du MS DAIM ont également la possibilité de suivre des cours de droit de la grande école, en bénéficiant d’une offre synergique avec la filière droit (droit des médias, droit et entrepreneuriat, pratique des affaires internationales…). Cela permet aux étudiants du MS DAIM de rencontrer les autres juristes de l’école, d’obtenir une plus grande culture économique internationale pour postuler au sein des grands cabinets d’affaires ;
- Dès la rentrée 2016/2017, les étudiants auront la chance de partager 6 cours en commun avec les étudiants des 10 autres MS de l’Essec, et ils participeront tous ensemble à des « business games », notamment la « digital week» organisée par le MS Marketing ;
- Nous organisons un forum droit ainsi qu’une journée dédiée aux métiers du droit faisant intervenir un panel d’une dizaine de professionnels, d’alumni représentatifs des différents métiers du droit (magistrats, avocats, directeurs juridiques, entrepreneurs). Chacun y exprime son parcours avec beaucoup de simplicité, les échanges avec les professionnels sont sans barrière et les étudiants apprécient cette proximité inédite qui les éclaire dans leurs choix de stage ou de carrière au meilleur moment pour eux ;
- Enfin, j’ai également créé en 2014 des « get together events» qui ont lieu trois fois par an dans le bar d’un palace parisien ; cela permet de réunir les étudiants, les alumni, les enseignants et les amis du MS DAIM.
Nous réfléchissons à présent à internationaliser notre offre pour la tribu droit de l’ESSEC suite à l’implantation de l’ESSEC à Singapour, à Rabat et à l’île Maurice.
S’il y avait une seule chose que vous aimeriez que vos étudiants retiennent de leur année, quelle serait-elle ?
Je dis toujours que c’est à mes étudiants de faire de ce programme ce pour quoi il sera encore et toujours reconnu demain. Je les pousse à travailler en mode projet pour tous les évènements que nous organisons, y compris leur voyage d’études qui mobilise 8 étudiants à temps plein pendant plusieurs mois (Berlin, Dubaï, Londres, New-York ont été nos 4 dernières destinations). Ils se responsabilisent, ils comprennent la finalité de leurs actions, les enjeux sous-jacents, ils s’investissent énormément et au fond, chacun en retire tout le bénéfice qu’il est venu chercher à l’ESSEC. Ce programme taille un projet professionnel sur-mesure pour chaque individualité qui l’intègre. J’ai le sentiment du devoir accompli lorsque je les rencontre quelques mois après la sortie et qu’ils me confient qu’ils sont exactement là où ils rêvaient d’être. Les pousser à se trouver, à faire les bons choix, à capitaliser leur année pour en faire un propulseur de carrière tout en créant des liens interpersonnels forts et durables entre eux est mon vœu.
Je leur ai posé votre question (« Que retenez-vous de votre année au sein du MS DAIM ? ») et voici leurs réponses, sans détours :
« Il s’agirait de la journée organisée au CNIT avec des professionnels venus partager avec nous leurs expériences professionnelles ». (Elaine)
« Je retiendrai le vrai « esprit promo » et les différents évènements organisés dans ce sens, qu’ils soient professionnels (forum ESSEC droit, présentations en cabinet…) ou qu’ils prennent forme dans un cadre plus détendu (« get together events », cohésion de la promotion toute l’année, voyage à Berlin… » (Jean-François)
« Le discours rédigé par Elise en maîtrise de l’expression, en début d’année, sur la libération des nains de jardin! » (Diane)
« Un savant mélange de bonne humeur, d’opportunités et d’excellence » (Stéphane).
« Je dirais « l’appel du fun ». C’est une expression que nous avons créé entre nous qui signifie « ne jamais manquer une occasion de s’amuser ensemble ». Nous avons eu un « appel du fun » à Dubaï en allant en boite de nuit alors que nous étions tous fatigués, nous avons eu un « appel du fun » quand nous sommes tous partis à Casablanca voir Caroline et Sophie et nous aurons un « appel du fun » ce soir à une soirée networking entre DAIMs. L’appel du fun est donc un appel à la mobilisation générale ! » (Hugo)
« La diversité mais complémentarité des enseignements économiques et juridiques » (Lionel).
« Les ateliers de négociations (…). Ces derniers sont extrêmement utiles pour regarder sous plusieurs angles une situation et pour comprendre que la construction d’une relation professionnelle durable se fait dans l’entraide. Je trouve ce cours très éclairant pour des élèves venant du milieu universitaire car c’est un vrai bain dans la pratique » (Sophie).
Je conclurai par un proverbe chinois que j’affectionne dans le cadre de ma fonction pédagogique à l’ESSEC et qui reflète la valeur humaniste de notre école : « Si tes projets portent à un an, plante du riz ; à vingt ans, plante un arbre ; à plus d’un siècle, développe les hommes. »
DES VALEURS QUI DONNENT ENVIE DE SIGNER AVEC LE MS DAIM de l’ESSEC
– Excellence académique, qui en fait indéniablement sa renommée et position de leader
– Ouverture internationale, innovation, humanisme, implication et proximité des étudiants comme des entreprises, permettant de nourrir un projet sur-mesure de haut vol
– Formation professionnalisante et proximité avec les entreprises : l’expérience de l’individu, le développement de sa créativité et de son esprit critique (apprentissage), la remise en question permanente, la proximité avec les entreprises sont la clé de voûte du programme
– La puissance du réseau des anciens, l’esprit d’une grande famille que l’on choisit et avec laquelle on s’engage pour toute sa vie