Par une décision du 29 septembre 2016, le TGI de Nanterre reconnait le laboratoire pharmaceutique UCB Pharma responsable de l’état de santé d’un « petit-fils Distilbène ». Il estime que l’exposition in utero de sa mère au Distilbène était la cause indirecte de ses lésions neurologiques.
Ø Le DES, en bref
Le Distilbène est un médicament prescrit aux femmes européennes des années 50 à 70 comme un « médicament miracle » en vue de la prévention des fausses couches. Il est aujourd’hui source d’un remarquable contentieux. Les dommages sont variés : troubles de la fertilité, développement de cancers, accidents de grossesse, voire accouchements prématurés avec des conséquences sur deux, voire trois générations.
Il a fallu attendre un jugement du Tribunal de grande instance de Nanterre du 24 mai 2002[1] pour que soit reconnu pour la première fois en France la qualité de victime à une jeune femme exposée in utero au Distilbène c’est-à-dire l’affirmation d’ « un préjudice d’exposition au DES ».
Ø La décision
En 1998, une jeune femme, « fille Distilbène », accouche prématurément de son fils. L’enfant souffre d’un polyhandicap, le handicap est évalué à 80%.
Les juges, sur la base d’une expertise complémentaire du dossier médical du petit-fils DES ont retenu le rôle indirect, mais certain du Distilbène dans les lésions motrices et psychiques qui touchent le jeune homme :
« Le lien de causalité, indirect, mais certain, entre l’infirmité motrice d’origine cérébrale et l’exposition au Distilbène », qui a provoqué la rupture prématurée de la poche utérine et la prématurité, « conduit à retenir la responsabilité de la société UCB Pharma, en dehors de toute autre cause retrouvée ».
Le polyhandicap dont souffre l’enfant est bien la conséquence de sa naissance prématurée et c’est l’anomalie utérine de sa mère qui a entrainé sa naissance prématurée. Donc c’est bien la prématurité qui est à l’origine des handicaps du jeune homme.
Déjà le TGI de Nanterre (décision du 6 mars 2014) et la Cour d’appel de Versailles (décision du 26 mai 2016) avaient admis le lien de causalité entre le déroulement de la grossesse de la mère du demandeur (« fille DES »), son accouchement prématuré (dû à une malformation utérine) et son exposition in utero au DES.
Le laboratoire est alors condamné à lui verser la somme de 595 000 euros au titre des dommages et intérêts.
Aujourd’hui seulement 4 cas de petit-fils DES ont été recensés en France. Espérons que cette décision puisse ouvrir la porte à bien d’autres demandes d’indemnisation de ces victimes de 3e génération.
POUR EN SAVOIR PLUS
Victoire d’une fille Distilbène : réparation du dommage malgré le défaut de présentation d’ordonnances, Elodie Guilbaud, lepetitjuriste.fr
Mise en pratique des orientations données par la Cour de cassation dans le contentieux relatif au Distilbène – Claire Quétand-Finet – D. 2012. 2859
[1] TGI de Nanterre, 1re ch.B., 24 mai 2002