Vers une reconnaissance de l'homoparentalité ?

 

 


 

 

 

Le 21 octobre dernier, pour la deuxième fois en France où 145 000 enfants vivent dans des familles homoparentales, un juge reconnaissait des droits familiaux à une homosexuelle en conflit avec la mère biologique avec qui elle avait été pacsée. Un jugement qui reflète bien l’évolution actuelle du droit de la famille.

 

 

 


 

 

Un premier jugement en ce sens est intervenu le 1er juillet 2010 : le tribunal de grande instance d’Annecy avait reconnu pour la première fois en France, des droits à un « parent social » en accordant la garde alternée pour la mère biologique et la mère sociale qui avaient été pacsées. Dans le conflit sur le choix de l’école, le juge avait donné raison à la mère sociale. Pour ce faire, le juge avait motivé sa décision sur le fondement de l’article 371-1 du code civil, en vertu duquel l’autorité parentale est un « ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l’intérêt de l’enfant ».

 

Peu de temps après, le 8 juillet 2010, la Première Chambre civile de la Cour de cassation rendait une décision en apparence spectaculaire : une femme avait demandé l’exequatur d’un jugement d’adoption rendu aux Etats-Unis, afin que l’adoption de l’enfant de sa compagne homosexuelle ait force exécutoire en France. Faisant valoir que le jugement d’adoption prononcé en Géorgie avait permis aux deux femmes d’exercer en commun leur autorité parentale et rappelant que le respect de l’intérêt de l’enfant était l’un des principes essentiels du Droit français, la Cour de cassation, avait ordonné l’exequatur du jugement.

 

Cependant cet arrêt ne peut s’appliquer qu’à des couples binationaux ayant bénéficié d’un jugement à l’étranger. Il existe bel et bien toujours ce que Maître Caroline Mécary, l’avocate de la mère adoptive, appelle une « discrimination à rebours » car « les couples homosexuels français sont moins bien traités que les couples binationaux » qui seuls pourront bénéficier de cette jurisprudence.

 

 

homoparentalit& le petit juriste

 

 

C’est le 21 octobre dernier que l’on a connu le dernier rebondissement. Sans avoir aucun lien de parenté juridique avec l’enfant, une femme, qui avait vécu six ans avec sa compagne, a obtenu le droit de rencontrer l’enfant et de vivre avec lui un week-end sur deux et la moitié des vacances.

 

Les juges se sont fondés sur l’article 371-4 du code civil qui dispose que si tel est l’intérêt de l’enfant, le juge aux affaires familiales fixe les modalités des relations entre l’enfant et un tiers, parent ou non ». Mais selon Me Mécary, ces jugements ouvrent la voie à une reconnaissance du rôle du « parent social », alors que rien n’est prévu pour lui dans le Droit français. Cela élargit la notion de famille « au sens sociologique » du terme.  Pourtant, le Conseil constitutionnel a, dans une décision du 6 octobre dernier, reconnu constitutionnel l’article 365 du Code civil, interdisant l’autorité parentale partagée entre deux personnes non mariées.

 

Certains, tels que Jean Hauser, spécialiste du Droit de la famille à l’université de Bordeaux IV, pensent que « cette décision n’a qu’une portée symbolique ». « Juridiquement parlant, la possibilité d’accorder un droit de visite à un tiers n’est pas nouvelle, explique-t-il. Ce tiers a depuis longtemps la possibilité d’invoquer le Code civil, dès lors qu’il s’est déjà occupé de l’enfant ». En réalité, L’originalité dans ce jugement est qu’il a été accordé le droit de verser une pension à l’enfant. Mais, si le juge avait décidé une obligation de verser une pension, la décision aurait été historique car il aurait fallu établir  l’existence d’un lien de filiation.

 

Me Mécary avait fait un recours en 2007 devant la Cour européenne des droits de l’homme pour « discrimination » touchant les couples homosexuels en les privant du droit d’adopter. Ce recours a été jugé recevable le 31 août 2010 et devrait être plaidé fin 2010, début 2011. Enfin, le 16 novembre dernier, la Cour de cassation a transmis au Conseil constitutionnel une Question prioritaire de constitutionnalité sur le mariage homosexuel. A suivre…

 

 

Fanny CONY

 

 

Pour en savoir plus

 


Le Monde, 29 octobre 2010, “homoparentalité des droits reconnus à la mère sociale d’un enfant

Dalloz, “droit de visite accordé a l’ex-compagne de la mère d’un enfant

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