Malgré quelques signes d’espoir et un volontarisme certain, Copenhague aura été à Kyoto ce que Waterloo aura été à Austerlitz, si tant est que Kyoto eut été une victoire. Entre les négociations bilatérales du plus mauvais effet (de serre) et la signature partielle d’un accord creux, le sommet a accouché d’une souris (verte).
Samedi 19 décembre, le Sommet de Copenhague s’est soldé par un accord non contraignant signé par les seuls pays qui le souhaitent. On sort ainsi du cadre institutionnel classique de l’ONU qui régissait cet évènement. L’ « accord de Copenhague » affirme la nécessité de limiter le réchauffement climatique à 2°C par rapport à l’air pré-industriel, sans pour autant prescrire aux Etats la moindre obligation.
Texte creux et principes vides
Le texte comporte plusieurs points majeurs, tous en deçà des termes du protocole de Kyoto. Ainsi, la température globale doit être ramenée d’ici 2050 à 2° de plus qu’avant les premières pollutions. C’est une déclaration de principe appréciable, mais plusieurs Etats avaient des exigences plus élevées (Maldives, Grenade).
Une aide à l’adaptation des pays en voie de développement a été décidée à hauteur de 100 milliards de dollars par ans à travers des « financements innovants ».
Concernant les objectifs chiffrés de réduction des émissions de CO2, ils sont absents du texte. Il est prévu que janvier 2010 voit les Etats exprimer leur engagement sur ce sujet. C’est donc, ni plus ni moins, un engagement à la carte. Si l’Union Européenne devrait maintenir son niveau déjà prévu à horizon 2020 (20% de moins d’émission), il n’a pas été relevé comme beaucoup le souhaitaient.
L’éventualité d’une Organisation Mondiale de l’Environnement est abandonnée pour l’instant, en attendant le sommet de Bonn prévu dans les six mois, et le prochain sommet climatique de Mexico fin 2010. Il est douteux qu’une telle organisation soit réellement utile, en ce sens que des outils de droit international existent déjà pour faire respecter l’environnement, et ce même si une organisation centrale n’existe pas, sous couvert de traités sectoriels. Sous pression de la Chine, les mécanismes prévus de contrôle du respect des (maigres) engagements par les pays en voie de développement devront respecter la souveraineté nationale. On doute donc de l’effectivité de ces procédures bi-annuelles.
Enfin, le texte prévoit la protection des forêts par des « mesures incitatives ».
La diplomatie-carbone: un écran de fumée ?
Le sommet de Copenhague a marqué les limites de deux systèmes. Le premier est celui de Kyoto, et de la doctrine environnementaliste en général. Le mélange d’incitations, d’accords à la serpe, bilatéraux ou multilatéraux, le manque de solutions alternatives véritables, et la culpabilisation massive ne suffisent plus à permettre l’adoption de mesures efficientes et d’envergure. Et la bonne volonté des présidents américain ou français n’a pu s’y opposer.
Le second système est celui du droit international, en particulier celui de l’ONU qui gérait la conférence. Les déclarations se sont succédées, contradictoires et démenties aussitôt (MM. OBAMA et SARKOZY annonçaient vendredi soir un accord connu d’eux seuls). La dernière séance plénière, tenue dans la nuit avec de nombreux absents, s’est caractérisée par une confusion générale. Surtout, ce sont les relations bilatérales qui se sont multipliées, complexifiant un peu plus les possibilités d’accord global sur la question climatique. Les pressions chinoises et américaines ont montré notamment que ces deux nations sont sûrement prépondérantes, mais aussi qu’elles sont incapables de s’accorder sur la marche d’un monde qu’elles souhaitent régir.
Il est évident que le droit international connaît la difficulté redoutable de ne pas posséder de normes réellement imposables à tous les Etats, si ce n’est peut-être quelques règles coutumières. Il est évident également que le droit de l’environnement est un droit tentaculaire et flou qui dépend du bon vouloir des nations. La pomme bio ne tombe jamais loin de l’arbre.
Richard Lethan
Pour en savoir plus |
Accord de Copenhague (encore en anglais) sur le site de la CNUCC |