Bien qu’un véhicule soit à l’arrêt, il peut être impliqué dans la production d’un dommage d’accident à la circulation et engager la responsabilité civile du propriétaire et du conducteur affirme la Cour de cassation dans un arrêt du 16 janvier 2020.
La deuxième chambre civile de la Cour de cassation affirme qu’il n’est pas nécessaire que le véhicule terrestre à moteur soit en état de marche pour qu’il soit impliqué dans le dommage[1]. Alors, la loi du 5 juillet 1985 (dite « Loi Badinter) relative à la responsabilité du conducteur et du propriétaire d’un véhicule terrestre à moteur à la suite d’un accident de la circulation s’applique. Leur responsabilité civile est engagée, et ils sont condamnés à des dommages-intérêts.
En l’espèce, un accident de la circulation provoque le décès d’une personne. Sa mère et sa sœur engagent la responsabilité du conducteur et du propriétaire d’un tracteur à l’arrêt mais qui avait une fuite d’huile rendant la chaussée glissante et l’état de la route a provoqué l’accident mortel[2]. Entre la production du dommage et le tracteur à l’arrêt, il y avait quelques centaines de mètres de distance pourtant. Malgré cela, la Cour de cassation condamne le conducteur et le propriétaire du tracteur aux motifs que l’implication qui est exigée dans l’article 1er de la Loi Badinter concerne « tout véhicule ayant joué un rôle quelconque dans la réalisation d’un accident ». Et qu’en l’espèce, la fuite d’huile d’un tracteur à l’arrêt avait rendu la chaussée glissante et suffisait à caractériser l’implication dans l’accident même s’il y a eu une distance de plusieurs centaines de mètres.
L’interprétation large de la condition d’implication
Ainsi, la haute juridiction maintient l’interprétation large qui est faite de la condition d’implication d’un véhicule terrestre à moteur dans la production d’un accident de la circulation, puisque ni l’état d’arrêt, ni la distance entre le tracteur et le lieu du dommage ne suffisent à l’écarter. Publié au bulletin, ce qui témoigne de l’importance de cet arrêt, la solution profite aux victimes d’accident de la circulation. Ce qui n’est pas sans rappeler le souci de la jurisprudence et du législateur de renforcer l’accès aux dommages-intérêts aux victimes. Néanmoins, la sanction est lourde pour les responsables qui ne peuvent pas se défaire de leur responsabilité en apportant l’absence de faute puisqu’il s’agit d’un régime de plein droit.
Pour rappel, la Loi Badinter prévoit la responsabilité du conducteur et du propriétaire d’un véhicule terrestre à moteur impliqué dans un accident de la circulation[3]. Alors, ce régime ne s’applique qu’en cas de dommages involontairement causés à la victime et qui sont imputables à des véhicules. L’une des particularités de la Loi Badinter est que le responsable ne peut pas invoquer la force majeure, ni le fait d’un tiers pour s’exonérer de sa responsabilité[4]. Etant un régime de plein droit à la faute des responsables, les exigences pour engager la responsabilité du propriétaire et du conducteur sont alors faibles[5].
Hugo Devesa, en L3 de droit à l’université de Tours
1 Site legifrance.gouv.fr > Cass. 2e civ., 16 janvier 2020, n°18-23.787, P+B+I
[2] Site courdecassation.fr > Jurisprudence > Deuxième chambre civile > Arrêt n°51 du 16 janvier 2020 (18-23.787)
[3] Article 1er de la Loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation
[4] Article 2 de la Loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation
[5] Article 3 de la Loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l’amélioration de la situation des victimes d’accidents de la circulation et à l’accélération des procédures d’indemnisation