Grégoire Hanquier a rejoint en septembre dernier la start-up Data Legal Drive au poste de directeur juridique, conformité et affaires publiques. Diplômé de l’université Paris 2 Panthéon-Assas et de HEC, l’ancien directeur juridique Europe, Afrique et Moyen-Orient de LexisNexis revient notamment pour nous sur l’importance de former les jeunes juristes aux legaltechs.
Vous venez de rejoindre Data Legal Drive, la plateforme spécialiste de la compliance RGPD fondée par Sylvain Staub. Dans quel état d’esprit êtes-vous ?
Je suis très heureux d’intégrer cette start-up. Après une carrière chez Total, Capgemini et LexisNexis où j’ai appréhendé le droit des affaires sous de multiples facettes, j’arrive à 40 ans, avec un solide bagage, pour accompagner l’hypercroissance de cette entreprise. C’est très stimulant intellectuellement de passer de ces grands groupes à une start-up et de prendre ainsi le chemin de l’entreprenariat.
Quelle va être précisément votre mission ?
Mon rôle va être d’améliorer la sécurisation juridique des engagements d’une entreprise qui grandit très vite. Au-delà de la gestion des problématiques contractuelles, corporate, de compliance interne, de conseils aux opérationnels, ma mission sera aussi d’accompagner les équipes produit dans l’appréhension des conformités multiples qui sont le quotidien de nos clients. Enfin, mon expérience et ma connaissance des marchés viendront contribuer à la visibilité institutionnelle de Data Legal Drive et à l’évolution de notre solution métier dans toutes les dimensions du pilotage de la conformité, RGPD mais aussi Sapin 2 et RSE. L’écoute des besoins de nos clients, de nos utilisateurs (DPO, compliance officier, juriste, avocats, etc.) est primordiale pour mieux les assister. Avec une petite équipe mais un fort impact.
Vous intégrez donc le codir (comité de direction) de Data Legal Drive en tant que directeur juridique, conformité et affaires publiques et devenez ainsi partie prenante des décisions stratégiques de l’entreprise.
Sylvain Staub a en effet souhaité renforcer son codir avec mon arrivée ce qui démontre une grande maturité dans l’appréhension de la fonction juridique. Nos homologues anglo-saxons, allemands, l’ont bien compris : tout choix business, du fait même de l’inflation règlementaire, provoque des risques juridiques et opérationnels qu’il s’agit d’anticiper rapidement dans la mise en œuvre de toute stratégie. Si les grands groupes ont intégré depuis longtemps la dimension « business partner » du directeur juridique et de ses équipes, ce n’est pas encore le cas dans une grande majorité des PME et ETI. Le droit n’est pas une simple fonction administrative mais participe pleinement, avec flexibilité et agilité, à la compétitivité des entreprises françaises. Cette création de poste témoigne qu’une évolution s’opère.
Vous entrez ainsi dans l’univers de la legaltech…
Oui et pas la moindre ! Data Legal Drive est le numéro 1 français des logiciels qui facilite la conformité RGPD des entreprises. En deux ans, cette legaltech a acquis plus de 500 clients et nous recrutons plusieurs dizaines de collaborateurs dans les mois qui viennent. Rejoindre un écosystème dynamique, être au cœur même de l’innovation pour les juristes est un vrai défi. Les legaltechs font désormais partie du quotidien des juristes professionnels. Ce sont des outils innovants qui leur permettent de se reconcentrer sur ce qui fait leurs valeurs ajoutées.
Des universités à l’image de Paris 2 Panthéon-Assas ou Nîmes, ont créé des cursus dédiés à la legaltech. Des initiatives que vous encouragez…
Sans conteste ! Appréhender le droit avec un prisme opérationnel, business, comprendre la révolution économique et numérique qui se déroule sous nos yeux, dans nos métiers, est innovant et ouvre des perspectives d’employabilité. J’aimerais d’ailleurs aller partager mon parcours avec ces étudiants qui ont fait le choix de se former à ce nouveau marché et leur présenter ce qui se fait de mieux dans notre domaine. C’est le rôle des legaltechs, jeunes et dynamiques, d’être présentes à leurs côtés afin d’élargir la vision de leur futur métier. Demain, ils seront les prescripteurs de nos solutions dans l’exercice de leur fonction.
Quels conseils donneriez-vous à un étudiant en droit qui souhaiterait exercer le métier de juriste d’entreprise ?
Si je tente d’aller à rebrousse-poil de certains cabinets et chargés de recrutement ou bien même de la sacro- sainte culture française du tout diplômé, je lui dirais déjà que l’obtention du CAPA n’est pas un prérequis indépassable pour exercer en entreprise. Nous sommes très largement nombreux dans ce cas et nous avons eu la chance d’avoir rapidement mis les pieds dans le business d’une entreprise en interaction avec des commerciaux, des équipes marketing, des services clients, des équipes IT et finance. Ma stratégie a été de faire le pari osé que CAPA ne rimait pas avec emploi de juriste d’entreprise. J’ai préféré m’ouvrir à la culture d’entreprise en rejoignant une école de commerce et être confronté ainsi très vite à la réalité de la vie économique. Je conseillerais aux étudiants de multiplier les stages dès la licence pour construire leur projet professionnel. En première année de droit, j’ai découvert le métier d’avocat lors d’un stage. En fin de licence, j’ai passé deux mois d’été au sein d’une direction juridique. J’ai enchaîné en fin de master avec six mois en entreprise et encore six mois à la fin de mon cursus d’école de commerce. Il faut se donner toutes les chances d’arriver sur le marché du travail avec un parcours qui colle avec ses envies, son tempérament et ses acquis universitaires. Si je devais demain faire un recrutement, je privilégierais un profil ayant un double cursus droit des affaires et master d’une grande école de commerce avec un bon niveau en anglais. N’oublions pas que nous, les legaltechs, avons des ambitions européennes voire internationales !
Propos recueillis par Séverine Tavennec