La loi relative à la protection de l’enfant, déposée au Sénat le 11 septembre 2014, fut finalement adoptée le 1er mars 2016 et parachève la loi du 5 mars 2007[1] réformant la protection de l’enfance.
Publiée au journal officiel le 15 mars 2016[2] et étant d’application immédiate, la loi n° 2016-297 (dite loi « Meunier-Dini ») comporte 49 articles et est source de nombreuses nouveautés dans le domaine de la protection de l’enfant.
Cette loi vient modifier plusieurs Codes : le Code de l’action sociale et des familles, le Code civil, le Code pénal mais aussi le Code général des impôts.
Les apports de cette loi sont multiples et seront scindés en plusieurs thématiques.
Instauration du Conseil national de la protection de l’enfance
Auprès du Premier ministre, ce Conseil national a plusieurs missions :
- proposer au Gouvernement les orientations nationales de la politique de protection de l’enfance,
- formuler des avis sur toutes les questions se rattachant à la politique de protection de l’enfance,
- évaluer la mise en œuvre de telles orientations.
Rôle majeur du président du Conseil départemental
Renforcement des missions de l’observatoire départemental de la protection de l’enfance
Placé sous l’autorité du président du Conseil départemental, l’observatoire départemental de la protection de l’enfance a désormais deux missions supplémentaires : « réaliser un bilan annuel des formations continues délivrées dans le département (…) et élaborer un programme pluriannuel des besoins en formation de tous les professionnels concourant dans le département à la protection de l’enfance ».
Hausse des fonctions octroyées au président du Conseil départemental
- Le président du Conseil départemental doit prévenir sans délai le Procureur de la République, notamment si le danger pour le mineur est « grave et immédiat, notamment dans les situations de maltraitance (…) aux fins de saisine du juge des enfants ».
- Le président du Conseil départemental est tenu de mettre en place un entretien avec tout mineur accueilli au titre de l’aide sociale à l’enfance, « un an avant sa majorité, afin de faire un bilan de son parcours et envisager les conditions de son accompagnement vers l’autonomie ». À titre exceptionnel, l’entretien peut être renouvelé « afin de tenir compte de l’évolution des besoins des jeunes concernés ». Un « projet d’accès à l’autonomie » est en outre élaboré avec le mineur.
- Le président du Conseil départemental conclut un protocole aménageant le partenariat entre les divers acteurs, en vue d’une meilleure préparation et d’un accompagnement de « l’accès à l’autonomie des jeunes pris en charge au sortant des dispositifs de l’aide sociale à l’enfance et de la protection judiciaire de la jeunesse ». L’objectif est « d’offrir aux jeunes de 16 à 21 ans une réponse globale en matière éducative, culturelle, sociale, de santé, de logement, de formation, d’emploi et de ressources ».
Consolidation du soutien médical et éducatif
Soutien médical renforcé
L’article L. 221-2 du Code de l’action sociale et des familles, relatif au « service de l’aide sociale à l’enfance » est complété par un quatrième alinéa instaurant dans chaque département un médecin référent en matière de protection de l’enfance, chargé d’organiser les modalités de travail régulier et les coordinations nécessaires entre plusieurs organismes, dans des conditions définies par décret :
- d’une part, entre les services départementaux et la cellule de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes ;
- d’autre part, entre les médecins libéraux et hospitaliers et les médecins de santé scolaire du département.
Soutien éducatif renforcé
La loi du 14 mars 2016 crée l’article L. 222-5-3 offrant la prise en charge, dans un centre parental, des enfants âgés de moins de trois ans, accompagnés de leurs deux parents dans les cas où ces derniers auraient besoin d’un soutien éducatif dans l’exercice de leurs fonctions parentales ou bien souhaiteraient préparer au mieux la naissance de l’enfant.
Meilleur encadrement des règles relatives à l’autorité parentale
La loi du 14 mars 2016 fut l’occasion de modifier certaines règles inscrites dans le Code civil et dans le Code pénal, relatives à l’autorité parentale en France.
Ainsi, cette loi a permis, entre autre, d’ajouter à l’article 378-1 du Code civil un cas de retrait total de l’autorité parentale. Il s’agit du cas où « l’enfant est témoin de pressions ou de violences, à caractère physique ou psychologique, exercées par l’un des parents sur la personne de l’autre ». Cette mesure vise à protéger l’enfant face au comportement parental.
De plus, les articles 221-5-5 et 222-48-2 du Code pénal sont revus, dans l’optique de permettre à la juridiction de jugement de se prononcer sur le retrait total ou partiel de l’autorité parentale, en application des articles 378, 379 et 379-1 du Code civil « en cas de condamnation pour un crime ou un délit, commis par l’un des parents sur l’enfant ou l’autre parent ».
Enfin, le service de l’aide sociale à l’enfance auquel l’enfant est confié peut intenter une action en vue d’obtenir le retrait de l’autorité parentale (article 41 de la loi).
Simplification des règles applicables à la révocabilité de l’adoption simple
Est révisé l’article 370 du Code civil.
Deux cas de figure se distinguent désormais nettement :
- soit l’adopté est mineur, auquel cas la révocation de l’adoption « ne peut être demandée que par le ministère public » ;
- soit l’adopté est majeur, auquel cas la révocation de l’adoption peut être faite « à la demande de l’adopté ou de l’adoptant ».
Acquisition de la nationalité française facilitée
Un enfant recueilli par un français peut désormais acquérir la nationalité française au bout de trois années – et non plus cinq années comme c’était le cas auparavant (article 42 de la loi).
Encadrement de la pratique des examens osseux
L’article 388 du Code civil inclut désormais un encadrement strict de la pratique des « examens radiologiques osseux » aux fins de détermination de l’âge du mineur.
Les limites sont les suivantes :
- aucun document d’identité ne doit être valable ;
- l’âge allégué doit être invraisemblable ;
- l’autorité judiciaire doit y avoir consenti ;
- l’intéressé doit obligatoirement avoir donné son accord préalable.
Dans tous les cas, « le doute profite à l’intéressé ».
Réintroduction de l’inceste dans le Code pénal
La notion d’inceste est réintroduite dans le Code pénal, aux articles 222-31-1, 222-31-2, 227-27-2-1 et 227-27-3.
Cette réintroduction fait suite à la décision du Conseil constitutionnel qui avait décidé, par une question prioritaire de constitutionnalité en date du 16 septembre 2011[3], de censurer l’article 222-31-1 du Code pénal, considérant que la notion d’inceste n’était pas suffisamment définie.
Sont désormais qualifiés d’incestueux les viols et agressions sexuelles commis sur le mineur par un ascendant, un frère, une sœur, un oncle, une tante, un neveu, une nièce ou le conjoint, concubin ou partenaire lié par un pacte civil de solidarité avec l’une des personnes susmentionnées, s’il a, sur le mineur ,une autorité de droit ou de fait.
Laetitia Maroussie
Sources
[1] Loi n° 2007-293, du 5 mars 2007
[2] JO du 15 mars 2016, loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant ; NOR : FDFX1507648L
[3] Décision Cons. const n° 2011-163 QPC