L’article L. 252-1 du Code de la sécurité sociale prévoit qu’en cas de faute inexcusable de l’employeur, la victime d’un accident du travail a droit à une indemnisation complémentaire. L’article L. 4154-3 du Code du travail institue une présomption de faute inexcusable de l’employeur lorsque celui-ci n’a pas fait bénéficier aux salariés en contrat à durée déterminée, en contrat de travail temporaire et aux stagiaires une formation renforcée à la sécurité prévu à l’article L. 4154-2 du même code.
L’employeur ne peut renverser cette présomption de faute inexcusable qu’en rapportant la preuve que les salariés ont bénéficié de la formation renforcée à la sécurité.
Le salarié victime d’un accident du travail (ou ses ayants droit en cas de décès) a le droit à une indemnisation journalière forfaitaire de remplacement du revenu en cas d’incapacité temporaire, d’un capital ou d’une rente en cas d’incapacité permanente de travail ou de décès (1). En cas de faute inexcusable de l’employeur, cette même victime peut prétendre à une indemnisation complémentaire (2).
Cette indemnisation complémentaire prend la forme d’une majoration de l’indemnisation perçue (en capital ou en rente) (3). Indépendamment, la victime a également le droit à la réparation des préjudices causés par « les souffrances physiques et morales, (…) esthétiques et d’agrément, (…) résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle » (4). Ces indemnisations complémentaires sont versées par la caisse primaire d’assurance maladie qui en récupère le montant auprès de l’employeur (5).
S’agissant des salariés à durée déterminée, des salariés temporaires et des stagiaires, le Code du travail a institué une présomption de faute inexcusable de l’employeur. L’article L.
4154-3 du Code du travail prévoit qu’en cas d’accident du travail d’un de ces salariés affecté à un poste présentant des risques particuliers, la faute inexcusable est présumée. Certains de ces postes à risques particuliers pour la santé et la sécurité sont énumérés dans le Code du travail (6) et d’autre peuvent figurer dans une liste établie par l’employeur. Cette liste est constituée après avis du médecin du travail et du comité social et économique si il existe (7).
L’affectation du salarié à un tel poste doit être mentionnée dans le contrat de mise à disposition, le contrat de mission ou le contrat à durée déterminée (8).
Cette présomption de faute inexcusable prévue à l’article L. 4154-3 du Code du travail est une présomption simple. En effet, elle tombe si l’employeur prouve avoir dispensé une formation de sécurité obligatoire pour les salariés en contrat à durée déterminée, en contrat de travail temporaire et les stagiaires (9).
Déjà appliquée par la Cour de cassation (10), la règle relative à cette présomption a été récemment précisée par la deuxième chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 11 octobre 2018 (11).
En l’espèce, une salariée d’une entreprise de travail temporaire a été victime d’un accident du travail alors qu’elle effectuait une mission d’ouvrière couvreuse dans une entreprise utilisatrice. La salariée a alors saisi la juridiction de sécurité sociale en reconnaissance de la faute inexcusable de l’entreprise utilisatrice.
La cour d’appel avait accueilli la demande de la salariée estimant que malgré la mise à disposition par l’entreprise de couteaux neufs et la mise en place de mécanismes permettant aux salariés d’avoir à leur disposition du matériel aux normes, la faute inexcusable de l’employeur était établie. L’entreprise contestait alors avoir commis une faute inexcusable estimant avoir apporté la preuve de la mise en place de mesures nécessaires pour préserver la salariée des risques auxquels son poste l’exposait et que cette preuve permettait de renverser la présomption de faute inexcusable. Les preuves apportées par l’employeur n’étaient alors pas celles de la dispense de la formation de sécurité renforcée prévue à l’article L. 4154-3 du Code du travail.
La Cour de cassation a appliqué strictement l’article L.4154-3 du Code du travail et a rejetté les arguments de l’employeur. Seule la preuve d’avoir dispensé à la salariée la formation renforcée à la sécurité est de nature à renverser la présomption de faute inexcusable.
Jessica SALOMONI, étudiante du master DPSE, Ecole de droit de la Sorbonne, Université de Paris 1, apprentie à la Fédération Française du Bâtiment
Valentine BEHUEL, étudiante du master DPSE, Ecole de droit de la Sorbonne, Université de Paris 1, apprentie chez Malakoff Médéric
(1) Article L. 431-1 du Code de la sécurité sociale
(2) Article L.452-1 du Code de la sécurité sociale
(3) Article L. 452-2 du Code de la sécurité sociale
(4) Article L. 452-3 du Code de la sécurité sociale
(5) Article D. 452-1 du Code de la sécurité sociale
(6) Article R. 4624-23, I & II du Code de travail
(7) Article R. 4624-23, III du Code de travail
(8) Article L. 1251-43, 4° du Code du travail
(9) Cass. civ. 2 ème , 18 janv. 2005, n° 03-30.570
(10) Cass. soc., 27 juin 2002, n° 00-14.744 ; Cass. civ. 2 ème , 21 juin 2006, n° 04-30.665
(11) Cass. civ. 2 ème , 11 oct. 2018, n°17-23.694