Claire Bouglé-Le Roux
Maître de conférences à l’Université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines
Master II d’Histoire du Droit
« Demander au passé des leçons et des exemples pour l’avenir » : c’est ainsi que le conseiller à la Cour de cassation Tarbé des Sablons définissait l’histoire du droit. Discipline indispensable à la culture juridique, elle permet en effet de prendre conscience de l’héritage reçu des grands juristes français qui nous ont précédés. Soulignant l’importance du temps dans les évolutions juridiques, l’histoire du droit apprend en effet au juriste à se situer ainsi dans une généalogie, et à connaître et aimer ses racines pour être en capacité de comprendre les enjeux juridiques contemporains.
Aussi engage-t-elle le juriste à porter sa réflexion à un haut degré d’analyse, envisageant le droit, non comme un simple outil technique, mais bien comme un art, au service du bien commun. Les formations supérieures spécialisées en histoire du droit, en théorie juridique, en philosophie du droit ou en droit comparé ont bien sûr vocation à préparer aux concours, mais également à consolider une formation technique pour parfaire une expertise, qu’elle touche au droit public ou au droit privé. Elles ouvrent par ailleurs aux métiers de la recherche universitaire, afin d’enrichir et de transmettre cet enseignement précieux aux étudiants en droit, appelés à former les grands juristes de demain.
Frédéric Audren
Chargé de recherche au CNRS Centre d’études européennes (UMR 8239)
Ecole de droit de Sciences Po
Un bon juriste n’est pas seulement un excellent technicien, il doit aussi être un jurisconsulte accompli. Cette notion, un peu désuète mais inactuelle, désigne ce professionnel qui, maniant avec compétence les outils juridiques, pense le droit dans toute sa complexité et réfléchit constamment sur le sens de sa mission, à son rôle dans la société du XXIe siècle. L’histoire du droit appartient à cette boite à outils du jurisconsulte. Elle pose à chacun des juristes une question cruciale et récurrente : à quoi tenons nous ? Face à des réformes législatives, à des décisions de justice, à des actes juridiques, il est indispensable non seulement de saisir l’héritage historique qui nous caractérise et nous définit mais aussi de l’actualiser pour le rendre vivant, de l’adapter ou, pourquoi pas, d’y renoncer. Réformes des professions réglementées et du droit du travail, modifications des règles de la filiation, nouvelle organisation territoriale ou encore législation sur l’égalité homme-femme : tous ces moments, comme d’autres, sont l’occasion d’interroger notre passé juridique, d’en saisir la relativité, la plasticité mais aussi la remarquable endurance. Mieux que quiconque, l’histoire du droit aide le juriste, et plus généralement le citoyen, à penser une tradition bousculée qui se consolide en se réinventant continuellement. S’engager dans la voie de l’histoire du droit permet de compléter très utilement la préparation aux concours judiciaires et administratifs, d’envisager une carrière dans l’enseignement et la recherche mais surtout, dans un monde plus globalisé évoluant à un rythme accéléré, de doter le juriste d’une conscience plus aigüe des défis juridiques contemporains, d’accompagner avec lucidité la demande croissante de droit. L’histoire du droit, vigilante mais prudente, permet de construire l’avenir bien plus qu’elle n’enchaine notre présent au passé.