Alors que fut adoptée la loi ouvrant le mariage aux personnes de même sexe (Loi n° 2013-404 du 17 mai 2013), c’est la question de l’adoption par ces mêmes couples qui a fait surface. Si celle-ci est autorisée aux couples homosexuels, la difficulté de mise en œuvre de ce droit (peu d’enfants à adopter en France et refus des autorités étrangères), a accru le recours à la PMA et ainsi bouleverser les principes du droit de la bioéthique français.
La procréation médicalement assistée (L2141-1 et suivants du Code de la santé publique) est aujourd’hui soumise à des conditions très strictes. Elle reste réservée aux couples hétérosexuels dont l’état d’infertilité pathologique a été médicalement constaté.
Cette interdiction a conduit de nombreux couples à procéder à cette pratique à l’étranger pour ensuite faire adopter l’enfant en France. Pendant longtemps, cette démarche fut rejetée par les tribunaux sur le fondement de la fraude à la loi, établie « lorsqu’on cherche à obtenir ce que la loi française prohibe, par des moyens détournés et formellement légaux, que ce soit en France ou à l’étranger » (TGI Versailles, 29 avril 2014). Cette jurisprudence est cependant tombée en désuétude au cours de l’année 2014.
« Le recours à l’assistance médicale à la procréation (…) ne fait pas obstacle au prononcé de l’adoption »
En effet, la Cour de cassation, dans deux avis en date du 22 septembre 2014, a jugé que : « Le recours à l’assistance médicale à la procréation, sous la forme d’une insémination artificielle avec donneur anonyme à l’étranger, ne fait pas obstacle au prononcé de l’adoption, par l’épouse de la mère, de l’enfant né de cette procréation, dès lors que les conditions légales de l’adoption sont réunies et qu’elle est conforme à l’intérêt de l’enfant (…) ».
Néanmoins, la Haute juridiction reste muette sur le point de la fraude. C’est l’intérêt de l’enfant qui se trouve au cœur de cette révolution juridique.
Depuis, les juges du fond appliquent ces avis très majoritairement et acceptent l’adoption des enfants nés par PMA par l’épouse de la mère. Cependant, la solennité de ces avis ne crée pas pour autant un climat de certitude dès lors qu’ils ne sont que consultatifs, comme le prouve un jugement récent du TGI de Cahors qui a refusé l’adoption (TGI Cahors, 22 septembre 2014 ; n° 14-70.007). Une évolution législative serait donc la bienvenue.
Une rupture d’égalité entre les couples d’hommes et de femmes ?
Cependant, nous sommes en droit de nous questionner sur une éventuelle rupture d’égalité entre les couples de même sexe hommes et femmes. Si les couples de femmes voient naître un droit à l’enfant, il en va différemment des couples d’hommes qui ne peuvent recourir à la PMA et dont la seule possibilité d’avoir des enfants est la gestation pour autrui, pratique aujourd’hui prohibée en droit français.
La CEDH ne remet pas en cause cette interdiction mais sanctionne néanmoins la France dans son refus d’inscrire les enfants nés par GPA sur les registres d’état civil, et ce, au regard du droit de chaque enfant à l’établissement de sa filiation (CEDH, Menesson c/ France 26 juin 2014).
Pour en savoir plus :
- Site Revue DLF à personnes-famille à « La procréation médicalement assistée face aux-droits européens un dilemme insurmontable »
- Site de la Cour de Cassation àJurisprudence àAvis àIntégralité des avis classés par annéesà2014à22 septembre 2014 – 1470007 et 1470006
- Site Dalloz avocats à « Les avis de la Cour de cassation relatifs à l’adoption plénière par l’épouse de la mère et la consécration jurisprudentielle d’un droit à l’enfant», Claire NEIRINCK
- Site Dalloz actualités à « PMA : la Cour de cassation autorise l’adoption», 24 septembre 2014
PEREIRA-ENGEL Evane
Elève avocate