En 1951, à Paris, le premier modèle d’intégration économique supranationale fut créé, la CECA. Les six pays fondateurs furent rejoints par d’autres Etats dans une logique d’élargissement de l’Union, bousculant les limites géographiques de l’Europe. Plusieurs pays dont la candidature est actée ou potentielle aspirent à ce devenir. Parmi eux, l’Islande fait figure d’exception. Ce pays, aujourd’hui candidat officiel, se veut-il pour autant membre de l’Union?
Un vaste processus d’intégration
Cette logique d’élargissement, dont les étapes s’étirent dans le temps, est basée sur un principe consigné à l’article 49 du Traité sur l’union européenne: « Tout Etat européen qui respecte les valeurs visées à l’article 2 et s’engage à les promouvoir peut demander à devenir membre de l’Union ». Cette disposition est concrétisée par les critères de Copenhague, arrêtés lors du Conseil tenu en juin 1993. Ces derniers exigent une démocratie stable, la primauté du droit, une économie de marché viable et la capacité à ingérer les règles. Ainsi de nombreux Etats, issus tant de l’Est que de l’Ouest, se sont conformés à ces exigences. Après toutes ces vagues d’intégration, l’Europe des 27 séduit encore puisque plusieurs pays désirent participer à la construction européenne.
Les progrès reconnus de l’Islande
En octobre 2008, l’Islande, l’un des pays les plus riche du monde est au bord de la faillite. Importée des Etats-Unis, la crise financière internationale est la principale responsable des avatars de l’île; explosion du chômage et de la dette publique, chute du gouvernement conservateur accusé de négligence. Mais c’est surtout l’effondrement de la monnaie islandaise qui marque les esprits des dirigeants. Les politiques l’ont toujours su : gérer une monnaie pour une population de 320 000 habitants, dans un monde globalisé, est devenu une chose mal aisée sinon impossible. L’Islande décide alors de se tourner vers l’Union européenne. Celle-ci permet alors plus que jamais la promotion de la stabilité économique et politique. L’Etat insulaire dépose sa demande de candidature le 17 juin 2009. Ainsi ce que veut l’Etat insulaire n’est donc pas tant l’Union que l’euro.
Quatrième Etat candidat, l’île rejoint les trois autres pays dont la candidature a été actée. Ce numerus clausus comprend désormais la Croatie, la Turquie, l’ancienne république yougoslave de Macédoine et l’Islande. De nombreux éléments tendent à favoriser une entrée rapide de l’Islande au sein de l’Union. Un premier facteur réside dans le changement de régime opéré le 1er février dans l’île. En effet, le gouvernement islandais est, depuis lors, conduit par le parti social-démocrate, parti largement en faveur de l’intégration du pays dans l’Union. La coalition au pouvoir aurait ainsi annoncé une modification à venir de la Constitution, pour rendre possible l’adhésion. Le respect de deux des critères de Copenhague, tels qu’ une économie de marché viable et une démocratie stable, constitue le deuxième facteur. Enfin, le pays appartient au marché commun et à l’espace Schengen, depuis 1995, et applique une grande partie de la législation européenne. Le 27 juillet 2010, forte de toutes ces données, Reykjavic s’est vue accordée le début des négociations par les 27. Le commissaire européen à l’élargissement, Olli Rehn, a affirmé que son adhésion pourrait avoir lieu dès 2011, la même année que la Croatie, donc les négociations ont pourtant débutées en 2005.
La volonté obstacle des islandais
Quatre étapes séparent encore l’Islande de son intégration dans l’Union. Alors que selon le principe « rien n’est acté tant que tout ne l’est pas », c’est l’Islande, elle-même, qui freinerait les négociations. Trois principaux domaines seraient source de désaccords. Elément attractif principal, l’euro pourrait bien faire changer d’avis le pays candidat. Déjà mis en exergue par la crise grecque et la réaction peu sociale des autres Etats membres de l’Union, le désamour entre l’Islande et l’Union a été consacré par la demande de la Grande Bretagne et des Pays Bas à l’Islande d’indemniser les particuliers britanniques et hollandais du naufrage des banques islandaises. La réponse des islandais, à 93% négative, fut sans appel. Deuxièmement, les quotas de pêche imposés par l’Union seraient incompatibles avec l’économie mixte de l’Islande dont l’un des principaux secteurs est la pêche. Enfin, la décision de l’adhésion de l’île n’appartient pas uniquement au parti au pouvoir mais à tout le gouvernement, lequel est fragilisé par la présence des alliés-verts, totalement opposés à ce projet.
Ces quelques données promettent de vives négociations des deux côtés, ne pouvant rien laisser présager quant à l’avenir de l’entrée de l’Islande dans l’Union européenne.
Camille Pelpel
Pour en savoir plus
|