Certains participants de l’ « île de la tentation » ont pris le pari d’assigner la société de production et de distribution, à savoir TF1, en requalification de leur contrat de participation en contrat de travail.
Le contrat de travail se définit comme un contrat synallagmatique, à titre onéreux, caractérisé par la fourniture d’un travail en contrepartie du paiement d’une rémunération, et par l’existence, dans l’exécution du travail, d’un lien de subordination juridique du travailleur à l’employeur.
La Cour d’appel de Paris, par trois arrêts en date du 12 février 2008, a confirmé les jugements du Conseil de Prud’hommes du 30 novembre 2005 et reconnu la qualité de salarié aux participants de l’ « île de la tentation ». Elle justifie cette requalification notamment au regard de l’immixtion des caméras dans la vie privée des participants qui permet d’écarter la notion de simple divertissement invoquée par la société distributrice. De plus, les directives données aux participants dans l’accomplissement des activités, des horaires de réveil ou encore la présence d’un règlement contractuel portant engagement du participant à suivre les instructions de la production liées au planning du tournage et à la règle du programme, permet, selon la Cour d’appel, de caractériser l’existence d’un lien de subordination.
Une qualification douteuse
De nombreux éléments permettent de douter de la solution apportée par les juridictions du premier et du second degré.
Tout d’abord, le travail est une « activité humaine exigeant un effort soutenu, qui vise à la modification des éléments naturels, à la création et /ou à la production de nouvelles choses, de nouvelles idées ». Or, le règlement de participation à l’ile de la tentation stipule notamment que les participants ont l’obligation d’agir de manière spontanée et naturelle, sans jouer un rôle, ce qui correspond exactement à un non-travail comme le soulève Monsieur Patrick Morvan.
Ensuite, selon une interprétation de la Cour de cassation, dès lors qu’un travailleur n’accomplit que « quelques missions spéciales ne revêtant pas un caractère permanent », il ne s’agit que d’ « une activité ponctuelle exclusive de tout lien de subordination ». Il semble que cette notion de missions spéciales s’applique aux participants à qui l’on propose des activités ludiques ou romantiques de manière ponctuelle.
Enfin, la présence d’un règlement comportant une liste d’obligations minimales ne peut être assimilée à l’existence d’un pouvoir de direction de la production sur les participants. Il s’agirait plus justement d’un contrat d’adhésion à une communauté qui répondrait à certaines règles que tous les membres se doivent de respecter.
a
a
Conséquence de la requalification en contrat de travail
La Cour d’appel, retenant la qualification de contrat de travail, prononce à l’encontre de la société de production des condamnations pour licenciements sans cause réelle et sérieuse. La cessation de la relation de travail ne respectant ni la procédure préalable de licenciement, ni l’énonciation du motif réel et sérieux du licenciement, les participants se sont vus attribués des dommages et intérêts importants, 15000 euros en moyenne.
La Cour de cassation, saisie d’un pourvoi par la société distributrice, rendra sa décision au mois de février ou avril 2009. La haute juridiction, va-t-elle résister à la tentation ?
Alexis Vaudoyer
Pour en savoir plus : |
Patrick Morvan, Le contrat de télé-réalité. À propos des arrêts « Île de la tentation » : Semaine sociale Lamy 9 juin 2008, n° 1357, p. 8 Sur les missions spéciales à caractère non permanent : Cass. soc., 31 oct. 2000, no 99-11.808, RJS 2001, no 124 |