La réforme constitutionnelle du 23 juillet 2008

 

 


 

 

 

La constitution française a fait l’objet de vingt quatre révisions depuis 1958, avec notamment l’élection du Président de la République au suffrage universel direct instauré en 1962, la possibilité de saisir le Conseil constitutionnel offerte à 60 députés ou sénateurs en 1974 ou encore l’instauration du quinquennat en 2000.

 

 


 

 

La réforme constitutionnelle, sous l’impulsion du comité Balladur, a été l’un des projet phare du Président de la République dès le début de sa campagne Présidentielle. En effet, cette réforme répond à une volonté de renforcer le rôle du parlement ainsi que d’accroître la défense des libertés fondamentales des citoyens vis-à-vis des institutions judiciaires ou administratives et leur permettre de se sentir plus proche de la vie politique du pays.

 

Le renforcement du rôle du parlement

Tout d’abord, le parlement voit sa position revalorisée car bénéficiera de la moitié de son ordre du jour. Plus précisément, la majorité parlementaire aura la possibilité durant 14 jours par mois de fixer son ordre du jour, un jour de séance par mois étant réservé par priorité à un ordre du jour fixé par les groupes d’opposition de l’assemblée et par les groupes minoritaires (article 23 de la constitution). Il est donc possible de constater que nous nous orientons vers une coproduction législative dans laquelle les groupes d’opposition et les minorités pourront se faire une place face à la majorité parlementaire.

De plus, le recours à l’article 49-3 de la constitution qui permet au gouvernement de faire adopter un texte sans vote est dorénavant limité aux seuls projets de lois de Finances ou de financement de la sécurité sociale et ne peut concerner qu’un seul texte par session (article 24).

 

La modification des pouvoirs du Président de la République

 

L’une des mesures phare de la réforme constitutionnelle est de permettre au Président de la République de prendre la parole devant le parlement réuni à cet effet en Congrès. Cette possibilité, qui a été largement contestée lors de l’élaboration du projet de réforme constitutionnelle car porte atteinte au principe de séparation stricte des pouvoirs, a néanmoins subsistée. A la suite de sa prise de parole devant les parlementaires, un débat sans vote sera organisé sans sa présence.

 

A cela s’ajoute le fait que le mandat du Président de la République ne pourra être reconduit pour plus de deux mandats successifs. Par conséquent, le Président ne pourra plus exercer plus de 10 ans à la tête de la France.

 

Enfin, certains de ses pouvoirs sont encadrés. En effet, le droit de grâce collective accordée au Président est désormais supprimé. Seul le droit de grâce individuel subsiste. De plus, le Président ne siègera plus au Conseil Supérieur de la Magistrature. Son pouvoir de nomination ne s’exercera qu’après avis public de la commission permanente compétente de chaque assemblée avec un droit de veto conféré aux membres de ces commissions en cas de votes négatifs représentant au moins 3/5ème des suffrages exprimés au sein des deux commissions.

 

Il est possible de constater que le Président de la République voit ses pouvoirs renforcés avec de nouvelles possibilités lui étant offertes. Néanmoins, certains droits lui ont été retirés ou sont encadrés par des commissions parlementaires.

 

 

La nouvelle protection des droits des citoyens et la volonté de les rapprocher de la vie politique.

 

En terme de relation entre l’administration et les citoyens, la création du « défenseur des droits » constitue une des grandes innovations de la réforme constitutionnelle de juillet 2008. Cette mesure ouvre le droit aux administrés de saisir une autorité publique indépendante lorsqu’ils s’estiment lésés par l’administration afin de faire respecter les libertés fondamentales. Le texte instituant cette nouvelle autorité a notamment pour but politique d’endiguer la prolifération des autorités administratives indépendantes d’où découlait d’importants conflits de compétences, mais aussi un éparpillement préjudiciable à la qualité même du système français de protection des droits et libertés. La lettre du texte énonce que « le Défenseur des droits veille au respect des droits et libertés par les administrations de l’État, les collectivités territoriales, les établissements publics, ainsi que par tout organisme investi d’une mission de service public ». Sa compétence est élargie notamment par l’exhaustive énumération des organes qui étend le champ de compétence du défenseur au-delà du seul dysfonctionnement des services publics.

 

De plus, cette réforme constitutionnelle renforce l’Etat de droit par la possibilité accordée aux tribunaux de contrôler la législation française vis-à-vis de la constitution. Il existait jusqu’à cette réforme de Juillet 2008 un étrange paradoxe qui permettait aux tribunaux de contrôler la compatibilité des lois françaises par rapport aux normes internationales mais non par rapport à la constitution française. Ce paradoxe est désormais supprimé. On considérait préalablement que le juge était l’autorité ayant pour vocation de faire appliquer les lois et qu’il ne pouvait, par conséquent, douter de leur légitimité et de leur compatibilité vis-à-vis de la constitution. Cette mesure permet de rapprocher la norme suprême de l’Etat des magistrats, avocats et justiciables.

 

Enfin, les citoyens ont dorénavant une possibilité de referendum populaire. En effet, un référendum d’initiative populaire pourra être organisé à l’initiative d’1/5ème des membres du Parlement, soutenue par 1/10ème des électeurs inscrits sur les listes électorales.

Cette réforme constitutionnelle bouleverse la situation institutionnelle préexistante sur un grand nombre de points. Quant à son application, même si certaines de ces dispositions s’imposent immédiatement, d’autres n’entreront en vigueur qu’à partir du 1er janvier 2009. D’autres encore devront être précisées par des lois ordinaires ou organiques comme notamment les conditions d’exercice du contrôle de constitutionnalité des lois à posteriori. De plus, le Président Nicolas Sarkozy a pour intention de procéder à cinq nouvelles réformes constitutionnelles avant la fin de son mandat ayant pour but notamment de renforcer les pouvoirs de l’opposition. Il semble donc que les dernières années du mandat du Président vont continuer à bouleverser la situation institutionnelle existante.

 

 

Alexis Vaudoyer


 

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