En 2019, 146 femmes ont été tuées par leur conjoint ou leur ex-compagnon. Bien des violences s’exercent lorsque les portes des foyers sont closes. La justice, sans possibilité de regard direct sur les non-dits, peut dorénavant s’atteler à une meilleure prise en charge de ce qui lui est rapporté. C’est dans cette optique que semble s’intégrer la loi n°2020-936 du 30 juillet 2020.
La loi n°2020-936 du 30 juillet 2020 visant à protéger les victimes de violences conjugales s’articule autour de trois axes principaux.
Les professionnels de santé pourront rapporter les faits violents à la connaissance du Procureur de la République, même sans accord de la victime.
Dans le cadre du contrôle judiciaire de l’auteur des faits, le juge d’instruction ou le juge des libertés et de la détention pourra ordonner la suspension du droit de visite et d’hébergement à l’égard des enfants, sans que n’aient été exercées des violences directes à leur encontre.
Enfin, la répression du harcèlement au sein du couple est renforcée par ladite loi, puisque lorsqu’il aura conduit au suicide ou à sa tentative, le harcèlement sera puni de dix ans d’emprisonnement et de 150 000 € d’amende et que le fait qu’il soit au sein du couple constitue une circonstance aggravante.
Les mesures « phares » de la loi du 30 juillet 2020
Dans un aspect novateur et protecteur de victimes, la loi précitée apporte un réel cadre juridique aux infractions de violences conjugales et comble des vides juridiques préexistants. Toutes ces dispositions ont un réel intérêt, bien que certaines soient même considérées comme essentielles. En ce sens, est à relever l’inscription automatique au Fichier judiciaire des auteurs d’infractions sexuelles ou de violences au sein du couple pour les infractions les plus graves, sous réserve toutefois d’une décision contraire émanant du juge. Aussi, la levée du secret médical lorsque les violences mettent en danger immédiat la vie de la victime, majeure et sous l’emprise de l’auteur des violences, permet aux professionnels de santé de décoincer la situation nocive pour les victimes en prenant l’initiative du signalement.
Enfin, le législateur a inversé une situation qui s’avérait jusqu’alors pour le moins illogique puisqu’il appartient désormais à l’auteur de violences conjugales (et non à sa victime) de quitter le domicile du couple. Dès lors, le juge aux affaires familiales doit attribuer la jouissance du logement conjugal au conjoint victime des violences, même s’il a bénéficié d’un hébergement d’urgence et quelle que soit la forme d’union du couple. Il ne peut être dérogé à ce droit que sur ordonnance spécialement motivée justifiant les circonstances particulières conduisant à ce que l’auteur des violences garde le domicile conjugal.
Le très récent lancement du Bracelet anti-rapprochement, grâce à l’article 3 de la loi du 30 juillet 2020, semble, lui aussi, consacrer une nouvelle ère de prise en considération réelle du quotidien de trop nombreuses femmes et victimes.
Inès Bathani