En droit d’auteur, il existe des exceptions aux droits patrimoniaux dont celle de parodie, qui est une illustration de la place accordée à la liberté d’expression dans notre droit. Mais comme toute liberté, elle se doit être limitée.
I/ Une exception fondée sur la liberté d’expression
La liberté d’expression a été consacrée par la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 à son article 11. Aujourd’hui, elle nous semble une évidence, mais sa détermination a été difficile. Les caricatures ont été combattues par les différents régimes politiques du 18ème siècle. Néanmoins, les juges de l’époque ont consacré l’exception de parodie en droit d’auteur en décidant que caricaturer une peinture ne constitue pas une contrefaçon. La Cour d’appel de Paris a bien précisé que cette exception est un des aspects de la liberté d’expression qui puise ses racines dans la liberté de caricature(1).
En droit d’auteur, cette exception donne un droit légitime de nuire à l’auteur de l’œuvre originelle. Plus que cela, c’est un droit à rire, à faire rire. Bien connue en France, elle a été codifiée en 1957 à l’article L122-5 4°. Au niveau européen, la directive 2001/29 a introduit dans le droit communautaire cette exception en lui donnant un caractère facultatif. Dans un arrêt la Cour de justice libéralise encore plus les conditions d’application de l’exception, démontrant ainsi la volonté de donner plus de force à la liberté d’expression même dans le cadre d’un droit exclusif comme le droit d’auteur(2).
II/ Une exception limitée par « tout ce qui peut nuire à autrui »
La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen énonce le principe de liberté mais prend garde à le limiter à tout ce qui peut nuire à autrui. En droit d’auteur, le législateur français a préféré limiter l’exception de parodie aux usages propres aux différents types de parodie à savoir la parodie, le pastiche et la caricature. En outre, ces lois du genre sont définies comme deux conditions à respecter : la marque d’humour et l’absence de confusion avec l’œuvre originelle. De plus, la jurisprudence a mis en place des gardes fous, la parodie ne doit pas porter atteinte ni à l’honneur ni à la considération de l’auteur ni le diffamer. Si les lois du genre ont été dépassées, l’auteur aurait une action en contrefaçon ou en violation de son droit moral ainsi qu’une action de presse. Ces limitations se justifient pleinement, on est libre mais pas dans l’excès.
Dans l’arrêt de la Cour de justice précité, les juges n’envisagent que de manière assez libérale les deux conditions françaises. L’appréciation doit se faire in concreto par la mise en œuvre d’un juste équilibre entre le droit exclusif et la liberté d’expression. Cette position ne respecte pas le principe d’interprétation stricte des exceptions in favorem auctoris. La question reste alors ouverte sur la définition de la liberté d’expression. Au regard des évènements tragiques, posons nous la question, nous juristes. Sur ce, je suis Charlie.
Satan Elodie
(1)Cour d’appel de Paris, 28 février 1995, légipresse, 1995, n°121, p251
(2)CJUE, 3 septembre 2014, C- C-201/13
Pour en savoir +
Pierre Yves Gautier, Propriété littéraire et artistique, 9ème édition, Puf, Paris, 2015
CJUE, 3 septembre 2014, RLDI, n°108, 2014, p29-32, note Castets-Renard