Créée en 1990 par la loi de finance pour 1991, la contribution sociale généralisée a la particularité d’être un prélèvement effectué sur l’ensemble des revenus au bénéfice de la protection sociale. D’une nature spéciale car partiellement déductible, son statut reste aujourd’hui discuté.
Malgré son nom, la C.S.G. reste pour le droit fiscal français un impôt c’est à dire « une prestation pécuniaire requise des particuliers par voie d’autorité, à titre définitif et sans contrepartie, en vue de la couverture des charges publiques » comme le définit le doyen Jèze. Néanmoins, la CJUE dans son arrêt Ruyter du 26 février 2015 et plus récemment le Conseil d’Etat semblent conférer à la CSG le statut de cotisation sociale.
Un impôt selon le Conseil constitutionnel
Lors de la création de la CSG en 1990, le Conseil constitutionnel avait été saisi par l’opposition parlementaire qui lui rejetait la qualité d’impôt au motif que l’argent collecté était affecté à la protection sociale. Le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 90-285 DC confirma le statut d’impôt à la CSG au moyen de sa conformité avec l’article 34 de la constitution française. Les sages affirmèrent qu’il ne peut s’agir que d’un impôt car contrairement aux cotisations sociales qui ouvrent des droits, la CSG n’ouvre aucunement l’accès à des prestations sociales.
La CSG sera de nouveau définie comme un impôt en 2000, par la décision n°2000-437 DC. Dans cette décision, le Conseil s’était appuyé sur l’article 13 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen qui énonce que « Pour l’entretien de la force publique, et pour les dépenses d’administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés. » Dans cette décision, les sages censurèrent la Loi de Finance pour la sécurité sociale de 2001 prévoyant une CSG à taux inférieur pour les bas salaires (jusqu’à 1,3 SMIC) au motif que cette disposition violait l’égalité de tous devant l’impôt.
Une cotisation sociale d’après la CJUE et le Conseil d’État
La définition de la CSG est restée jusqu’en 2000 une question de droit interne jusqu’à ce que l’arrêt de la CJCE du 15 février 2000, Commission c/République Française, mette en demeure la France de considérer la CSG comme une contribution sociale et non comme un impôt. Par voie de conséquence, elle somme la France d’exempter les non résidents fiscaux français de cette cotisation, conformément au règlement de la communauté européenne 1408/71 relatif à l’application des régimes de sécurités sociales aux travailleurs salariés, aux travailleurs non salariés et aux membres de leurs familles qui se déplacent à l’intérieur de la communauté. Cet arrêt s’explique notamment au motif que les contribuables non résidents étaient soumis à ce prélèvement affecté à la sécurité sociale sans pour autant pouvoir jouir de droits en retour.
En 2004, le Conseil d’Etat dans l’arrêt Martin c/Ministre de l’économie nie de nouveau le caractère de cotisation sociale en reprenant les mêmes arguments que le Conseil constitutionnel en 1990. En 2012, avec l’extension de la base de cotisation de la CSG aux revenus immobiliers des non résidents fiscaux français ainsi qu’aux plus-values immobilières (loi de finance rectificative 2012), la question fut de nouveau posée à la CJUE. Cette dernière trancha alors (26 février 2015, Ruyter) en faveur du statut de cotisation sociale. Cela a permis aux non-résidents fiscaux français, de se faire exonérer de ce prélèvement. Le 27 juillet 2015, le Conseil d’Etat penche également dans le sens d’une cotisation sociale reprenant l’argumentaire de la CJUE en exonérant le requérant de la CSG sur les opérations contestées. Cet arrêt ouvre la voie aux contribuables non-résidents fiscaux de demander un remboursement de la CSG sur les opérations immobilières taxées depuis la loi de finance rectificative de 2012.
Une requalification qui aurait de lourdes conséquences fiscales
Si le gouvernement et l’administration fiscale reprennent la décision du Conseil d’Etat et de la CJUE, l’impôt sur le revenu des résidents fiscaux français se trouvera naturellement augmenté du fait de l’article 154 quinquies du Code Général des Impôts qui exclut de la déduction de la base fiscale les cotisations sociales. De même, cette qualification entraine une diminution de ressources affectée à la sécurité sociale du fait de l’exonération des cotisations sociales pour les non-résidents fiscaux. Cette requalification pose indirectement la question du financement de la protection sociale en France puisque la CSG contribue de manière quantitative à celle-ci.
Cyrille Grandclément
Pour en savoir + :
Livre : Droit Fiscal Général ,Broché, LexisNexis, ISBN 2711019441 , Ludovic Ayrault, Olivier Negrin, Lamarque
Curia europa , communiqué de presse n°22/15
Code Général des Impôts article 154 quinquies
Arrêt Ruyter 27 juillet 2015 CE 334551