Alors que l’on me transfère une invitation pour assister au lancement de la seconde édition de la Clinique Juridique de Paris 8, je ne connais pas encore cette initiative. J’ai néanmoins remarqué que récemment de nombreuses «cliniques » voyaient le jour afin de rattraper le retard que nous avons pris par rapport aux pays anglo-saxons en la matière… Et quel retard !
Après quelques recherches, et surtout après quelques questions, je découvre que La Clinique juridique correspond à un moyen de venir en aide aux plus démunis, en leur fournissant un conseil juridique – dans les limites du monopole de conseil de l’avocat, et ce gratuitement et de manière personnalisée. Les conseils sont alors prodigués par des élèves de troisième année de licence, entièrement volontaires et encadrés par des professeurs, avocats et professionnels du droit tout aussi bénévoles.
Intriguée par cette belle initiative, lancée par M. Benjamin Pitcho, Melle Claire Geeraerts, M. Jean Laingui et M. Chaumet Pierre-Olivier, je me décide à assister à ce lancement en direct de Ma librairie du droit, célèbre librairie juridique de la rue soufflot.
Le rendez-vous est pris à 17h, et malgré la tentation du WE prolongé, très nombreux sont les étudiants à être présents dans cette librairie. En effet, pas moins d’une quarantaine de personnes se tiennent alors au milieu des livres et autres codes juridiques, attendant gaiement l’arrivée du maitre de cérémonie. D’ailleurs, on aperçoit même une pile de Petits Juristes près de l’entrée !
Quelques minutes plus tard, Benjamin Pitcho, président de la Clinique, fait son entrée, afin d’accueillir des plus chaleureusement ses nouvelles recrues. C’est alors qu’un sentiment fort de reconnaissance, mêlé à beaucoup de fierté compte tenu du chemin parcouru par l’ancienne promotion, se dégage du corps enseignant tout entier : le ton est donné, les nouveaux membres ont de sacrés défis à relever.
Le succès de la Clinique Juridique se constate en effet par ses membres puisque lors de son lancement l’an passé, la Clinique avait débuté grâce à la participation de 15 élèves fondateurs qui furent ensuite rejoints par 6 autres élèves.
A l’heure du lancement de la seconde édition, les volontaires qui furent sélectionnés – fonction de leur motivation et leurs notes – sont au nombre de 33.
Avide d’en savoir plus sur les enjeux quotidiens d’une telle association, je décide d’aller poser mes questions à sa vice-présidente, Irène Lim. Souriante et communicative, elle m’explique qu’elle a intégré la Clinique Juridique alors qu’elle débutait sa troisième année de droit. Cette participation comptait pour ses études puisqu’elle correspondait à un UE d’enseignement à part entière, étalé sur un an complet.
Ses motivations pour intégrer la Clinique sont alors simples et réfléchies : il s’agit pour elle de « pratiquer le droit, enfin, et pour de vrai ! C’est la première fois qu’il est possible de suivre un enseignement de type formation pratique à l’université de droit dans le cadre d’une année de licence et en rapport avec des affaires réelles. Ainsi, sous forme de permanences de plusieurs heures dans la semaine, et par groupe de deux ou trois élèves, il s’agit d’appréhender des dossiers concrets, parfois complexes, du début à la fin de sorte à prodiguer un conseil ou une solution à la personne en difficulté juridique. Tout ce travail s’effectue avec l’assistance de professeurs, avocats, professionnels, qui aide au début les élèves, pour ensuite les laisser en autonomie et effectuer qu’un contrôle final des activités réalisées ».
Je lui pose alors la question de savoir qu’est-ce que lui a apportée sur le plan universitaire et professionnel son année en tant que clinicienne du droit. Sa réponse est évidente : « une approche concrète et pratique de la matière juridique. J’ai appris à faire de la recherche juridique, monter des dossiers, appris aussi à tenir un entretien avec un client, à le conseiller. C’est un vrai aperçu du métier d’avocat. D’ailleurs, sur un plan plus personnel, cette année m’a aussi permise de rencontrer beaucoup de personnes, et notamment des professionnels. J’ai ainsi pu recevoir de précieux conseils, participer à des évènements en tout genre (et notamment passer à la TV !), et acquérir ainsi une certaine maturité ».
En bref, en peu de temps, et en écoutant Irène parler, je me fais la réflexion que cette expérience que représente la Clinique Juridique est vouée à un succès immense : j’y vois là, grâce à son coté pratique, le médicament miracle des étudiants à qui le droit donne parfois mal à la tête.
Comment se déroule l’organisation de la Clinique ?
Les élèves sont répartis en groupe et chaque groupe s’engage dans la tenue d’une permanence de 4h supervisée par des professeurs de droit et des praticiens. Les permanences se déroulent dans une salle qui leur fut dédiée au sein de l’université Paris 8. Durant la permanence, les étudiants dit « cliniciens » reçoivent ces personnes ayant besoin d’une assistance juridique mais qui n’ont pas les moyens de se l’offrir. Généralement il s’agit d’étudiants ou salariés de l’université. En plus de la proximité, la Clinique crée un climat de confiance et une zone rassurante pour le justiciable. La tenue des rendez-vous au sein de l’Université est réconfortante puisqu’aux antipodes de l’image renvoyée par les salles d’attente froides des cabinet d’avocat.
La prise en charge par la Clinique
Il est à noter que tous les cas ne peuvent être pris en charge par nos cliniciens. A la suite de l’entretien préliminaire avec le justiciable, les élèves rédigent un rapport résumant le cas afin que leurs enseignants jugent de la possibilité pour la Clinique de prendre en charge ce dossier.
Les dossiers trop complexes au regard des compétences des étudiants peuvent être refusés tout comme les affaires urgentes. Dans ces cas précis, les justiciables sont redirigés vers des avocats.
Tous les autres cas sont en principe traités par la Clinique qui une fois la situation déterminée va faire ressortir les problèmes de droit et proposer des moyens d’action par la rédaction d’une note d’analyse. Nos élèves cliniciens ne sont donc plus cantonnés aux fictifs cas pratiques distribués en travaux dirigés mais ont l’opportunité d’en traiter de réels et d’aider des personnes dans le besoin. Suite à cette entretien et l’étude du dossier les élèves, encadrés par leurs enseignants rendent un rapport d’analyse au justiciable dans les 15 jours. Celui-ci pourra alors solliciter un nouveau rendez-vous afin que les détails du rapport lui soient expliqués.
En un an, les cliniciens ont traité près de 100 cas ! Une véritable prouesse, tant pédagogique que sociale, à saluer et surtout à imiter!
Laura Lizé
Salomé Lewis