Stéphane Grynwajc fait partie de ces personnes qui marquent les esprits. Grâce à sa pédagogie sans limite, il est devenu un spécialiste des carrières juridiques à l’international et un défenseur sans limite de la french touch. Il a de nombreuses fois dû affronter les barreaux français et étranger pour pouvoir tour à tour exercer en cabinet puis en entreprise et ceci entre la France, la Grande-Bretagne et les Etats-unis c’est pourquoi il milite aujourd’hui pour la reconnaissance d’un statut d’avocat en entreprise en France.
- Pouvez-vous nous expliquer votre parcours ?
A la sortie de mes études de droit j’ai exercé en cabinet à Paris avant de partir effectuer un LLM à la New York University (NYU) School of Law. A la sortie de mon LLM j’ai exercé brièvement en cabinet avant de rejoindre l’entreprise en France, puis en Angleterre. En 2011 j’ai créé mon cabinet d’avocat, à Londres d’abord, puis de retour à NY. Je suis inscrit comme avocat aux barreaux de Paris et de New-York, ainsi qu’à la Law Society of England and Wales.
- Comment avez-vous fait pour exercer en Angleterre puis aux Etats-Unis?
Après avoir exercé en cabinet puis en entreprise en France j’ai déménagé à Londres en 2000 afin d’exercer en tant que juriste d’entreprise au sein d’un groupe technologique américain. J’ai continué d’exercer en entreprise sur place jusqu’à fin 2010, puis j’ai quitté le monde de l’entreprise pour retourner en cabinet et créer ma propre structure, d’abord à Londres puis à NY où je suis désormais installé.
- Comment parvenir à se vendre à l’international en tant que juriste français ?
En France, nous avons un excellent système universitaire qui forme des juristes d’excellence. Cependant, quoiqu’excellente une formation, voire une expérience professionnelle n’a de valeur que si on est en mesure de la vendre. Cette exigence de marketing personnel et professionnel est d’autant plus nécessaire quand on vient d’un autre pays et que l’on a tout à créer sur un nouveau marché. Vous devez vous présenter avec vos propres atouts : une formation de haute volée et une connaissance parfaite du système civiliste. On vous demande si vous êtes qualified ? Si vous êtes juriste d’entreprise français, vous êtes tout à fait qualifié(e) pour exercer en entreprise. Si vous êtes avocat français et que vous souhaitez exercer comme tel en cabinet, obtenez une licence d’avocat communautaire en Angleterre ou de FLC aux US et positionnez-vous comme titulaire d’une licence et autorisé à exercer le droit en Angleterre ou aux US sous cette licence. En revanche ne commencez surtout pas à éduquer les recruteurs externes sur les différences de statut entre juristes et avocats en France. Cela n’intéressera pas les recruteurs et surtout cela pourra jouer contre vous dès lors qu’ils essaieront de comparer la situation avec le UK ou les US. A la sortie, vous pourriez vous retrouver dans des rôles de paralegal sans aucune relation avec votre formation et expérience de juriste.
- Un conseil aux jeunes professionnels envisageant de réaliser un LLM ?
Aujourd’hui beaucoup étudiants pensent à postuler à un LLM au UK ou aux US après leur Master 1 ou Master 2, en raison des nombreux échanges universitaires. Néanmoins, mon observation des difficultés que les étudiants rencontrent pour trouver une expérience professionnelle sur place à la sortie du LLM, est venue conforter mon opinion que vous profiterez davantage de ce diplôme et serez davantage en mesure de vous vendre sur le marché après quelques années d’expérience professionnelle en France. Les facultés sont très friandes des profils un peu expérimentés, et le marché d’autant plus, vu le nombre de diplômés étrangers sur le marché (ils constituent plus du tiers de tous les candidats au barreau de NY chaque année). Généralement les candidats au LLM sont chassés par les grands cabinets avant même leur diplôme. Seulement à moins d’avoir pu acquérir une expérience dans le pays de votre LLM, vous n’attirerez que les cabinets en France. Vous allez ensuite acquérir une expérience en droit français et il vous sera très difficile de changer de pays car cela impliquerait de revenir à l’échelon local de qualification le plus bas du cabinet. Moins de 10% des français titulaires d’un LLM exercent réellement à l’étranger.
En tant que jeune avocat ou juriste français, avoir un LLM et être titulaire d’un barreau américain ne vous ouvrira pas automatiquement les portes des cabinets sur place. D’où l’importance d’adopter une vraie stratégie marketing et de positionnement personnel et professionnel dès votre arrivée aux US, de développer votre réseau local, et de faire appel aux Anciens restés sur place après leur LLM ou qui sont revenus après quelques années, afin d’apprendre de leur expérience. Apprenez de ceux qui vous ont précédé et faites jouer à fond le networking en commençant dès avant votre arrivée par tisser les bons contacts depuis la France.
Good to remember
Le solicitor peut exercer trois missions principales : le conseil juridiques, le conseil économique et le rôle de notaire. En revanche, ce conseiller n’est habilité qu’à plaider devant certaines juridictions. Le monopole de la plaidoirie devant les hautes juridictions appartient aux Barristers.
Les détenteurs, même français, d’un barreau américain peuvent demander à bénéficier de la passerelle de l’article 100 pour avocats étrangers à Paris. Cette passerelle dispense de la formation des 18 mois de scolarité à l’EFB.
Interview réalisée par Laura Lizé