Facebook : la vie privée mise à nu ?

 


 

L’institut Goldman a fait tomber la nouvelle en ce début d’année : Facebook a passé la barre des 600 millions d’utilisateurs, soit 10 % de la population mondiale. Les déboires actuels vis-à-vis du non-respect de la vie privée sur Facebook n’auront donc pas réussi à décourager les nouveaux arrivants sur le réseau social, de plus en plus nombreux chaque année.

 


 

Beacon, New Feed, Instant Personalization … Ces noms ne vous disent peut être rien, et pourtant ces fonctionnalités, voulues par Facebook, mettent gravement en danger la vie privée des utilisateurs. Instant Personalization, la plus récente d’entre elles a particulièrement suscité la grogne par la violation qu’elle fait de la confidentialité des informations sur les internautes. Ce système autorise en effet trois compagnies, Microsoft, Yelp et Pandora, à utiliser les données des utilisateurs de Facebook se connectant sur leurs sites pour une navigation « personnalisée ». Si se désinscrire du programme n’est pas impossible, la plupart des usagers n’y font pas attention … Et surtout, rien n’est fait pour, le profil réglé par défaut étant un profil public.

 

Récemment, la polémique est allée encore plus loin. En avril 2010, quatre sénateurs américains  ont adressé une lettre ouverte à Mark Zuckerberg, le créateur de Facebook, lui enjoignant de prendre des mesures concrètes afin de mieux protéger la vie privée des internautes. Ceux-ci souhaitaient, entre autres, que Facebook mette en place une plus grande confidentialité vis-à-vis des informations des utilisateurs, en autorisant par défaut ceux-ci à ne pas communiquer leurs données personnelles et en permettant une plus grande transparence sur le sujet.

 

Malgré cela, de nombreux utilisateurs continuent de subir les frais du manque de confidentialité récurrent sur Facebook …

 

Le récent jugement en date du 19 novembre 2010 du Conseil des Prud’hommes de Boulogne Billancourt en est une parfaite illustration. Dans cette affaire, trois employés du groupe ALTEN sont jugés pour avoir créé un groupe privé sur Facebook par le biais duquel ils critiquaient leur hiérarchie et se plaignaient de leurs conditions de travail. Leurs supérieurs ayant découvert le pot aux roses, les salariés ont été mis à pied puis licenciés, licenciement jugé abusif par deux d’entre eux qui l’ont contesté devant le conseil des Prud’hommes puis devant le juge départiteur.

 

facebook le petit juriste

 

Les propos tenus par les parties contribuent à faire avancer le débat sur le régime des conversations privées tenues sur Facebook. En effet, les salariés mettent en avant le fait que leur licenciement est dépourvu de causes réelles et sérieuses puisque les propos retenus par la partie adverse ont été extraits de la page personnelle du salarié, page non accessible à l’ensemble des internautes. En réponse à cela la société ALTEN estime qu’ « elle n’a pas violé le droit au respect de la vie privée… l’usage de Facebook permettant d’avoir accès à des informations sur la vie privée lues par des personnes auxquelles elles ne sont pas destinées ».

 

Le juge départiteur a donné raison à la société ALTEN en s’appuyant sur le fait que le compte du créateur de la page Facebook litigieuse est configuré de telle sorte que « les amis de ses amis » peuvent y avoir accès. Dès lors, on ne peut opposer à la société ALTEN, « amie » de l’ami qui lui a transmis les informations conduisant au licenciement, l’article 9 du Code Civil relatif au droit au respect de la vie privée et l’article 226-18 du Code pénal qui incrimine « le fait de collecter des données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite ».

 

On peut également noter qu’un arrêt de la chambre sociale de la Cour d’Appel de Reims en date du 9 juin 2010 avait déjà traité du sujet, en estimant cette fois que la publication d’un message sur le « mur » d’un ami ne constitue en rien une correspondance privée, notamment si le profil n’est pas protégé dans ses paramètres de confidentialité.

On ne peut toutefois déduire de ces jugements le caractère privé ou public du réseau social, chaque contentieux relatif à Facebook devant faire l’objet d’un jugement au cas par cas.

 

 

Anne-Sophie HOUDU  

 

Pour en savoir plus


Article sur l’inquiétude des sénateurs américains (commentcamarche.net)

 

« Privacy on facebook » sur le site about.com

 

Legifrance.gouv.fr

 

 

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