Au terme d’une élection haletante, Donald J. Trump a été élu 45ième président des Etats-Unis. Après avoir pris office de ses fonctions, il s’est empressé de prendre une série de décrets pour déployer sa politique pour le moins déroutante au regard de certains droits et de certaines libertés internationales. De ce fait, la procédure d’impeachment revient au goût du jour et apparait comme une possible porte de sortie face à la crise politique qui sévit aux Etats-Unis.
La procédure d’impeachment est née en Grande-Bretagne au XVIIe. Elle est créée dans le but de donner la possibilité à la Chambre des Communes de traduire un ministre devant la Chambre des lords à la suite d’une infraction pénale. Par le biais de la colonisation anglaise, la procédure arrive aux États-Unis, s’y implante et développe ses propres caractéristiques pour cohabiter avec le régime présidentiel américain, qui ne prévoit aucune responsabilité exécutive – ce qui fait l’une de ses caractéristiques. Il faut regarder l’article 1 section 3 de la Constitution de 1787 pour trouver un pouvoir dont disposerait le Congrès (Sénat et Chambre des représentants) pour poursuivre pénalement un Président. La sanction la plus lourde pouvant être la destitution pure et simple de la fonction occupée.
La procédure est simple : c’est la Chambre des Représentants qui en a l’initiative, sur proposition de sa commission des affaires juridiques, avec la préparation d’un acte d’accusation. La décision de poursuite de l’impeachment se fait à la majorité simple de la Chambre puis, est transférée au Sénat. C’est le Sénat qui vote alors la destitution à la majorité des deux tiers des membres présents. On donne ainsi au Congrès un pouvoir d’obliger le Président à s’expliquer de ses actions.
L’article 2 section 4 de la Constitution de 1787 dispose que : « Le président, le vice-président et tous les fonctionnaires civils des États-Unis pourront être destitués de leurs fonctions sur mise en accusation suivie de condamnation pour trahison, concussion ou autres crimes ou délits. » L’idée d’une condamnation pénale est claire mais l’expression « autres crimes ou délits » laisse néanmoins sceptique quant à l’interprétation que l’on peut en faire. On peut inclure dans cette formule de très larges considérations, y compris et surtout politiques, comme va le démontrer la pratique américaine. La première procédure de destitution remonte à 1868 avec Andrew Johnson, et l’opposition farouche du Sénat pour une loi qu’il jugeait inconstitutionnelle. La procédure fut caduque suite à une majorité perdue à une voix près. Ensuite, il y a eu l’affaire du Watergate et du Président Nixon qui s’est vu opposer comme chef d’accusation : « obstruction à l’égard de la justice », « abus de pouvoir » et « outrage au congrès ». Il démissionna avant que la procédure n’aboutisse. Enfin, la dernière en date est celle de Bill Clinton pour « parjure » et « obstruction à l’égard de la justice » dans l’affaire Lewinsky, dans laquelle il a été jugé non coupable.
Au vu des précédents historiques et de l’interprétation extensive dont peut faire l’objet le terme « d’autres crimes et délits », on peut penser que la procédure n’est pas à exclure en dépit de sa gravité. Pour autant il faut rappeler que la majorité au Sénat et à la Chambre des représentants est de la même couleur politique que le président Trump, ce qui semble écarter la possibilité d’impeachment à court terme. Néanmoins dans deux ans, lors des élections de mi-mandat à la chambre des représentants, il n’est pas à exclure un possible changement de couleur politique, et donc une mise en œuvre de l’impeachment, permettant au Congrès de jouer pleinement son rôle de contrôle et de pression sur l’exécutif présidentiel.
Nelly Bytchkowsky
Pour aller plus loin :
Institutions politiques et droit constitutionnel, 14ième édition, L.G.D.J, Philippe Ardant.