L’assemblée nationale a voté le 13 octobre dernier une loi relative à la transparence de la vie publique qui a pour but de contrôler et vérifier les déclarations du patrimoine et d’intérêt en début et fin de mandat des membres du gouvernement, des parlementaires nationaux et européens, des principaux responsables exécutifs locaux, des membres des autorités administratives indépendantes, des collaborateurs ministériels et présidentiels, des titulaires d’emploi à la décision du gouvernement et des responsables des principales entreprises publiques.
Pour assurer à bien sa mission, le législateur a créé une autorité administrative indépendante, la haute autorité relative à la transparence de la vie publique, qui remplace la commission pour la transparence financière de la vie publique créée par une loi organique du 11 mars 1988.
La différence entre ces deux lois est notable : dans un premier temps, par l’organisation des autorités, dans un deuxième temps, par la publicité des déclarations qui est désormais possible pour les élus et dans un troisième temps, par l’ajout de la déclaration d’intérêt.
En effet, la haute autorité relative à la transparence de la vie publique est composée de 6 conseillers, en activité ou en honoraires, élus par le Conseil d’Etat, la Cour des comptes et la Cour de cassation qui remplacent les trois membres de droit (Présidents de la Cour des comptes ; Président de la Cour de cassation ; Vice-Président du Conseil d’Etat) et les six membres élus avec leur adjoint (par la Cour des comptes, la Cour de cassation et le Conseil d’Etat) de la commission pour la transparence financière de la vie publique.
Deux personnalités qualifiées sont ajoutées à la haute autorité de la transparence de la vie publique qui sont nommées par le Président des deux chambres après avis conforme de la commission permanente chargée des lois constitutionnelles de chaque chambre.
De même, les sanctions prévues par chaque loi ne sont pas exactement semblables. On remarque un accroissement de la dureté des peines.
La loi de 1988 prévoyait une inéligibilité d’un an pour les élus et la nullité de la nomination pour les membres non élus si ceux ci refusaient de déclarer leur patrimoine, ainsi que de 15 000 euros d’amende si le refus était en fin de mandat. En cas de fraude, la peine était de 30 000 euros.
Avec la nouvelle loi, les peines pénales varient de 3 ans d’emprisonnement avec 45 000 euros d’amende en cas de refus de transmission du patrimoine et des intérêts (excepté pour les membres du gouvernement où la peine est de 5 ans d’emprisonnement et de 75 000 €uros d’amende) à 10 ans, au plus, d’inéligibilité en cas d’infraction portant atteinte à la moralité publique.
Pour inclure une sorte de responsabilité politique à la loi du 13 octobre 2013 pour toutes les personnes exerçants une haute fonction, la loi prévoyait également de rendre publiques toutes les déclarations de patrimoine. Or le conseil constitutionnel a invalidé les alinéas qui prévoyaient la publicité des patrimoines des personnes non élues car il a considéré que cela n’avait aucun lien avec l’objectif poursuivi et que c’était contraire au respect de la vie privée.
De même, la déclaration d’intérêt étant un moyen de prévenir les situations d’interférence entre des intérêts publics et privés qui pourraient engendrer des conflits d’intérêt avec l’exercice indépendant, impartial et objectif d’une fonction publique, le législateur a considéré que la situation des proches pouvait être compromettante. Or, le conseil constitutionnel a invalidé cet alinéa au motif que cela constituait une atteinte excessive à la vie privée.
On peut par ailleurs remarquer que cela est contraire à l’article 8 alinéa 1er de la Conv. EDH qui dispose que toute personne a le droit au respect de sa vie privée et familiale, et au 2ème alinéa de la même convention qui dispose qu’il ne peut pas y avoir « ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui […] est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. ».
Si le conseil constitutionnel avait validé la déclaration des activités professionnelles des parents et enfants, un recours aurait pu être formulé devant la cour européenne des droits de l’Homme.
A l’inverse, le conseil constitutionnel n’a pas invalidé tout ce qui est lié à l’interdiction pour les membres du gouvernement, les titulaires de fonctions exécutives locales et les membres des autorités administratives indépendantes de participer aux prises de décision qui pourraient créer un conflit d’intérêt, et à l’interdiction pour les membres du gouvernement et les titulaires de fonctions exécutives locales de rejoindre une entreprise en lien avec leur ancienne fonction. Cela permet notamment d’assurer la sûreté publique.
Typhaine Berthet Boutaric
Pour en savoir plus:
http://www.legifrance.gouv.fr/affichLoiPubliee.do?idDocument=JORFDOLE000027354777&type=general
http://www.echr.coe.int/Pages/home.aspx?p=basictexts&c=fra#n1359128122487_pointer
http://www.commission-transparence.fr/index.html