L’Autorité de la Concurrence a rendu, le 15 février 2016, un avis qui présente une analyse concurrentielle du droit applicable aux offres non conformes, tout en proposant des évolutions à l’heure de la transposition des directives du 26 février 2014.
Le droit de la commande publique ne peut se comprendre sans prendre en compte la dimension concurrentielle. Garantissant le libre accès des candidats, leur égalité de traitement et la transparence des procédures, les règles de passation des contrats publics poursuivent aussi un but d’efficience économique et de bon usage des deniers publics.
A cet égard, elles ne doivent pas permettre de distorsions de concurrence, ce qui implique le respect d’un certain formalisme. Or, il ne doit pas nuire à l’effectivité de la mise en concurrence, ce qu’estime la commune de Saint-Germain-en-Laye, auteur de la saisine, lorsqu’il s’agit d’écarter des offres comportant une irrégularité minime.
Le Code des marchés publics définit la marge de manœuvre de l’acheteur en fonction de la procédure de passation. Dans une procédure sans négociation (appel d’offres), les offres non conformes (irrégulières, inappropriées ou inacceptables) sont éliminées sauf demande de l’acheteur de précision ou de complément [1] et sans modification de l’offre. Pour les procédures formalisées négociées, seules les offres irrégulières ou inacceptables peuvent être régularisées en cours de négociations, à condition que les exigences impératives du marché soient respectées. Il en est de même, dans les procédures adaptées, pour toutes les offres non conformes, dans le respect de l’égalité de traitement.
Un assouplissement proposé.
Dans le cadre de la préparation des décrets d’application de l’ordonnance du 23 juillet 2015, transposant les directives Marchés, l’Autorité de la Concurrence prend position sur trois évolutions envisagées pour une plus grande flexibilité.
A cet égard, le projet de décret permettrait, dans tous les cas, la modification des offres en vue de leur régularisation, sans porter atteinte à ses caractéristiques essentielles. L’Autorité émet un avis négatif car un tel assouplissement pourrait conduire à modifier les offres dans leurs caractéristiques « non substantielles » avec un risque de discrimination.
Ceci a pour corollaire l’information des candidats afin de concilier préservation de la confidentialité et transparence de la procédure. L’Autorité défend une obligation d’information encadrée, bien que celle-ci ait été supprimée dans la dernière version du projet. Cette obligation apparaît nécessaire pour préserver l’égalité entre candidats, sans toutefois révéler ni l’identité des entreprises, ni la teneur de l’offre.
Enfin, l’instauration d’une obligation de demander la régularisation des offres irrégulières ne convainc pas davantage l’Autorité. Défendue par une mission sénatoriale [2] , rejetée par les acteurs concernés [3] , elle n’a pas été consacrée par le projet de décret.
Adrien Hipp, Stéphane Naudin et Michael Rigollot.
Master 2 Droit Public de l’Economie – Université Panthéon-Assas (Paris II).
[1] CE, 25 mars 2013, Département de l’Hérault ; CJCE 29 mars 2012, SAG ELV Slovensko as. et autres aff. C-599/10.
[2] Rapport d’information sur la commande publique « Passer de la défiance à la confiance : pour une commande publique plus favorable aux PME », 15 octobre 2015.
[3] L’Autorité de la concurrence a recueilli les avis de l’AAP, APASP, des fédérations d’entreprise (MEDEF) et du secteur du bâtiment (FFB, CINOV, UNTEC).