Le mercredi 20 mars, la Commission européenne a sanctionné, pour la troisième fois en deux ans, le géant américain pour abus de position dominante. L’amende s’élève à 1.49 milliard d’euros.
Une nouvelle fois, les GAFA (Google, Amazon, Facebook, Apple) sont au centre des discussions au sein de l’Union européenne. Souvent décriés pour leur pratique de l’optimisation fiscale, c’est sur le terrain du droit de la concurrence que la Commission a une nouvelle fois sanctionné Google.
Une troisième condamnation en 2 ans
L’article 102 TFUE est devenu en deux ans, l’arme favorite de la Commission européenne afin de réprimer les pratiques du géant américain.
La guerre ouverte que mène Margrethe Vestager, commissaire européenne à la concurrence, commence le 27 juin 2017. Le service Google Shopping est accusé d’avoir profité de la position de Google sur le marché européen afin d’évincer la concurrence sur le marché des comparateurs de prix. L’amende est de 2.5 milliards d’euros.
Au moment de son prononcé, cette sanction établit un record au sein de l’Union. Elle sera très nettement pulvérisée un an plus tard. Cette fois- ci, l’abus de position dominante concerne le service de la recherche en ligne grâce à son système Android. Google obligerait les constructeurs à préinstaller un certain nombre de ses applications sur leurs téléphones. L’amende est alors de 4.4 milliards d’euros.
Lors de ce troisième acte, la « Tax Lady » inflige donc une nouvelle amende de plus d’1.49 milliard d’euros. Le programme de régie publicitaire Adsense est alors mis en cause. La Commission reproche à Google d’imposer des clauses restrictives dans les contrats passés avec les tiers. En trois ans, ce n’est pas moins de 8,25 milliards d’euros que doit payer le géant américain pour ses pratiques anticoncurrentielles.
Des amendes à relativiser
Bien que ces montants soient très impressionnants, il faut toutefois les relativiser. En effet, en cas d’atteinte à la concurrence sur le marché européen, la Commission peut infliger des amendes pouvant aller jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires mondial de l’entreprise. En 2018, ce dernier s’élevait à plus de 136,2 milliards de dollars. Google aurait ainsi pu écoper d’une sanction s’élevant à plus de 13 milliards d’euros.
Au lieu de cela, cette dernière amende ne représente que 1 % du chiffre d’affaires total. Très en dessous des possibilités offertes par le droit européen. Un tel montant ne représente pas une charge insurmontable pour le géant américain. Sitôt payée, sitôt oubliée, la sanction n’aura qu’une incidence limitée sur le budget de Google.
Plus préoccupant, elle ne remplit pas non plus son rôle dissuasif tant les bénéfices engrangés par le service est bien supérieur à l’amende infligée. Il serait presque possible pour la société de la prévoir à l’avance et anticiper un passif dans son budget.
La nouvelle stratégie européenne face aux GAFA
La nouvelle Commission mise en place en 2014 a considérablement changé sa stratégie face aux dérives concurrentielles des GAFA. Alors que l’ancien commissaire à la concurrence, Joaquim Almunia, privilégiait le dialogue et la conclusion d’accord avec le géant américain. La méthode utilisée par Margrethe Vestager est complètement différente. Fini la conciliation, la sanction est désormais l’option privilégiée.
Ayant fait l’erreur de ne pas aider à la création de son propre GAFA, l’Union se trouvait dans une situation de défense de sa souveraineté numérique. Aujourd’hui, la contre-attaque semble être lancée. L’association d’une politique de sanction et la mise en application du Règlement général sur la protection des données (RGPD) semble redonner aux Européens une maîtrise de leur espace numérique.
Florian Berger en M2 droit européen des affaires à l’université Jean-Moulin Lyon 3.