Le mois dernier, un article du Petit Juriste portait un intérêt particulier au régime de rémunération des dirigeants mandataires sociaux d’entreprises cotées, que le Code de gouvernement d’entreprise conjointement rédigé en octobre 2008 par le MEDEF (Mouvement des entreprises de France) et l’AFEP (Association française des entreprises privées) se proposait d’encadrer, voire de moraliser. Le point sur les nombreuses évolutions survenues depuis lors.
Le Code de gouvernement d’entreprise du MEDEF et de l’AFEP édictait des principes d’entreprenariat « éthiquement responsables » en ces temps de crise, auxquels les entreprises françaises cotées sur les marchés règlementés étaient fortement incitées à adhérer. Citons parmi les points fondamentaux abordés le non-cumul du contrat de mandataire social et du contrat de travail, la suppression des « parachutes dorés » pour les dirigeants d’entreprises en situation d’échec, le renforcement de l’encadrement des régimes de retraite complémentaires, et l’instauration de nouvelles règles pour les options et les actions de performance. L’annonce en janvier par le MEDEF de l’adhésion de la quasi-totalité des entreprises du CAC 40 et d’une grande majorité des entreprises cotées sur Euronext à ce Code apparaissait comme un signe de bonne volonté, mais la question de la force contraignante de ces engagements, et de leur effective application par les entreprises engagées demeurait.
Un rapport d’information du Sénat du 8 avril 2009 (« Rémunération des mandataires sociaux : une première évaluation ») dresse un premier bilan de l’efficacité de ces mesures. Ayant pris l’engagement d’évaluer la conduite des entreprises à l’aune des règles évoquées par le Code, une commission sénatoriale a procédé le 11 mars 2009 à des auditions des parties prenantes au débat sur la rémunération des mandataires sociaux. Il ressort du rapport que si l’ensemble des parties concernées ont salué l’opportunité des recommandations établies par le MEDEF et l’AFEP, des problèmes demeurent, certains intervenants relevant qu’il n’existe pour le moment aucun système de sanction susceptible de faire effectivement respecter les engagements pris (ces recommandations relèvent plutôt de la « soft law »).
De plus, le rapport insiste sur le fait que la limitation par les pouvoirs publics de la rémunération des dirigeants d’entreprise n’apparait légitime que si ces entreprises ont comme actionnaire l’Etat, ou qu’elles reçoivent de lui des financements directs. Le 30 mars, François Fillon avait pris un décret encadrant les conditions d’attribution de bonus et stock-options aux dirigeants des entreprises bénéficiant d’un soutien public exceptionnel dans le cadre de la crise financière, ce qui satisfaisait à ces exigences. Mais la colère sociale et l’exaspération affichée du Président Sarkozy à l’encontre de la faiblesse de ces mesures ont conduit le Parlement à approuver le texte du collectif budgétaire 2009 négocié en commission mixte paritaire et reprenant l’amendement du sénateur Arthuis (président de la Commission des Finances du Sénat), lequel visait à supprimer stock-options et bonus aux dirigeants des entreprises directement ou indirectement aidées par l’Etat : ainsi tous les sous-traitants de l’automobile aidés par l’Etat, mais aussi les entreprises aidées par le Fonds stratégique d’investissement (FIS) seraient concernées par cette mesure.
Les pouvoirs publics ont donc pallié efficacement à la tiédeur de mesures qui péchaient par leur force non-contraignante. L’action du Parlement en faveur de mesures réellement adaptées à la situation économique et sociale est salutaire, car les récentes séquestrations de dirigeants d’entreprises sont un des signes forts du mécontentement social grandissant.
Jean Christophe Grognet
Pour en savoir plus : |
Amendement Arthuis : http://ameli.senat.fr/amendements/2008-2009/297/Amdt_74.html
Le rapport du Sénat : http://www.senat.fr/rap/r08-332/r08-3321.pdf
Le décret gouvernemental : http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000020459719&dateTexte=&categorieLien=id |