Pour une meilleure information du preneur, les lois Grenelles [1] issues du Grenelle de l’environnement sont venues imposer que des documents à caractère environnemental soient annexés à tout bail commercial conclu ou renouvelé.
Plus précisément, ces documents sont :
– Le diagnostic technique amiante ou DTA (articles R.1334-29-4 et R.1334-29-5 du Code de la santé publique),
– Le diagnostic de performance énergétique ou DPE (article L.134-3-1 du Code de la construction et de l’habitation),
– L’état des servitudes « risques » et d’information sur les sols ou ESRIS (article L.125-5 du Code de l’environnement),
– La déclaration sur la sinistralité connue du bien (article L.125-5 IV du Code de l’environnement),
– L’annexe environnementale du « bail vert » pour les locaux à usage de bureaux ou de commerces d’une surface supérieure à 2 000 m2, (article L.125-9 du Code de l’environnement).
Ces documents exigés en cas de conclusion et de renouvellement d’un bail commercial sont-ils requis en cas de cession de droit au bail ?
I – L’absence d’exigence expresse des informations environnementales
La cession de droit au bail est l’acte par lequel le cédant, bénéficiaire du bail, va transmettre ses droits à une tierce personne, appelée cessionnaire. Le preneur ne cède pas son fonds de commerce en entier, mais uniquement le droit au bail qu’il comprend. Autrement dit, le preneur va transmettre le droit qu’il tient du bail à un tiers qui va devenir le nouveau preneur, sans que le contrat de bail ne s’en voit affecté, le même contrat se poursuivant, avec pour seul changement la personne du preneur.
En l’état actuel du droit, aucun texte n’impose de communiquer ces annexes environnementales à l’occasion d’une cession de droit au bail.
Quant à la jurisprudence, elle ne s’est prononcée qu’à une seule occasion sur le sujet, à propos de l’état des risques naturels et technologiques, anciennement dénommé plan de prévention des risques naturels (PPRNT).
Le Tribunal de grande instance de Toulouse a en effet retenu que, dans la mesure où l’article L.125-5 du Code de l’environnement ne s’applique qu’aux immeubles, à l’exclusion des biens meubles comme le fonds de commerce, dont le droit au bail est une composante, le PPRNT – désormais ESRIS – n’est pas exigé lors d’une cession de droit au bail [2].
Cependant, même si aucun nouveau contrat de bail n’est conclu, la personne du preneur change. Or, le cessionnaire ne dispose d’aucune information sur les caractéristiques environnementales du local loué, pourtant potentiellement déterminantes pour lui.
Par exemple, dans l’hypothèse d’un local contenant de l’amiante, le cessionnaire n’aurait sûrement pas consenti à la cession de droit au bail s’il en avait eu connaissance, la présence d’amiante entraînant des contraintes supplémentaires notamment en présence de salariés dont il faut protéger la santé et la sécurité.
C’est la raison pour laquelle l’on peut penser que ces informations environnementales sont implicitement exigées.
II – L’exigence implicite des informations environnementales
Par précaution, il faut mieux informer le cessionnaire et ce, pour plusieurs raisons.
D’une part, le cédant pourrait voir sa responsabilité engagée sur le fondement du nouvel article 1112-1 du Code civil qui consacre une obligation générale d’information et dispose, en son alinéa 1er, que : « celle des parties qui connaît une information dont l’importance est déterminante pour le consentement de l’autre doit l’en informer dès lors que, légitimement, cette dernière ignore cette information ou fait confiance à son cocontractant » . Cette responsabilité serait de nature délictuelle car sanctionnant un manquement pré-contractuel.
D’autre part, le cédant qui maintient volontairement le silence alors qu’il a en sa possession des informations déterminantes pour le cessionnaire commet une réticence dolosive, susceptible d’entraîner la nullité du contrat pour dol, conformément aux dispositions de l’article 1137 du Code civil.
La cour d’appel de Nîmes a en effet considéré que le défaut d’information du cédant sur l’état des risques naturels et technologiques en sa connaissance pouvait être constitutif d’une réticence dolosive, entraînant la nullité de la cession de droit au bail [3].
Par conséquent, il est fortement recommandé au cédant de fournir au cessionnaire toutes les informations environnementales en sa possession, ce qui passera a minima par l’annexion d’une copie des documents qui avaient été annexés lors de la conclusion du bail entre le cédant et le bailleur.
[2] TGI Toulouse, 29 janvier 2009, n°07-03.211.
[3] Nîmes, 13 décembre 2011, n° 09/04138.
Pour plus d’informations :
Mémento Baux commerciaux, Éditions Francis Lefebvre, 2017-2018, 5000 et suivants.
Lamy Baux commerciaux, Wolters Kluwer, Etude 201 : La forme du bail commercial.