Par sa décision du 19 juillet 2017, le Conseil d’Etat juge illégale la suspension de la deuxième procédure d’examen de l’interruption des traitements de M. Vincent Lambert, fondée sur d’éventuelles menaces pour la sécurité du patient et de l’équipe soignante.
En janvier 2014, le médecin en charge de M. Lambert décide de mettre fin à l’alimentation et à l’hydratation artificielles de son patient. Cette décision est portée devant la justice nationale puis européenne qui la juge légale (Conseil d’Etat, 24 juin 2014, décision rendue après expertise médicale ; validée par CEDH, 5 juin 2015).
En 2015, suite à ces décisions de justice, le neveu de M. Lambert demande alors au CHU de Reims de mettre en œuvre la décision prise par le médecin. Mais le nouveau médecin en charge du patient décide de suspendre cette décision. Il invoque que les conditions de sérénité et de sécurité nécessaires à sa poursuite, tant pour le patient que pour l’équipe soignante, ne sont pas réunies. Aucun terme n’est donné à cette suspension. Il demande alors la mise en œuvre d’une nouvelle procédure collégiale.
La Cour administrative d’appel de Nancy par un arrêt du 16 juin 2016 annule la décision de suspension de la procédure collégiale. Elle enjoint le médecin en charge du patient de répondre aux obligations lui incombant vis-à-vis de ce dernier. Néanmoins, elle refuse de lui enjoindre la mise en œuvre la décision prise en janvier 2014 par le médecin alors en charge de M. Lambert.
Par son arrêt en date du 19 juillet 2017 (n° 402472,403377), le Conseil d’Etat juge tout d’abord que la décision prise en janvier 2014 par le médecin en charge de M. Lambert ne peut plus recevoir application, dès lors que le médecin qui l’a prise n’est plus en charge du patient. En effet, seul le médecin en charge du patient peut décider de l’arrêt des traitements.
Ainsi, c’est le médecin actuellement en charge de M. Vincent Lambert qui devra à nouveau se prononcer sur l’engagement d’une procédure d’examen de l’arrêt des traitements (du maintien de son alimentation et son hydratation artificielles) de l’intéressé.
Par ailleurs, les juges rappellent que le médecin ne pouvait en l’espèce se fonder sur un tel argument que celui invoqué pour prendre la décision de suspendre la procédure pour une période indéterminée et engager une nouvelle procédure collégiale pour examiner la question de l’arrêt des traitements. En effet, pour apprécier si les conditions d’un arrêt d’alimentation et d’hydratation artificielles sont réunies, le médecin doit se fonder sur un ensemble d’éléments, médicaux et non médicaux, dont le poids respectif ne peut être prédéterminé et dépend des circonstances particulières à chaque patient. Les éventuelles menaces pour la sécurité du patient et de l’équipe soignante ne sont pas un motif légal pour justifier l’interruption d’une procédure engagée en vue d’évaluer si la poursuite de l’alimentation et de l’hydratation artificielles traduit une obstination déraisonnable.
Le Conseil d’Etat rejette donc les pourvois dont il est saisi et confirme ainsi l’annulation de la décision de suspendre la procédure pour une période indéterminée. Ainsi, la décision de suspendre l’alimentation est annulée, l’alimentation et l’hydratation artificielles sont reprises.
Affaire à suivre…
Le 22 septembre 2017, le CHU de Reims informait par courrier la famille de M. Vincent Lambert du souhait du neveu du patient d’engager très prochainement une quatrième procédure collégiale.
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