Le droit du sport offre aux passionnés la possibilité de s’épanouir professionnellement. Le Petit Juriste, curieux de savoir comment se passe cet alliage entre la passion du sport et le droit, est allé à la rencontre de Raphaël Boutin, Directeur Administratif et juridique à la Ligue de la Méditerranée de Football.
Présentez-vous (en deux ou trois phrases)
Je suis originaire de Grenoble, je me suis installé à Aix-en-Provence en 2008 lorsque j’ai intégré la Ligue de la Méditerranée de Football. Marié, papa de deux petits garçons, je suis passionné de sport, et particulièrement de football.
LPJ – Quel est votre parcours universitaire et professionnel ?
Raphaël Boutin : Après un BAC ES, j’ai intégré la faculté de Droit de Grenoble. Mon Master I en Droit des Affaires obtenu, j’ai recherché le M2 qui me conviendrait le mieux. Etant passionné de sport, j’ai naturellement postulé pour un Master 2 en Droit du Sport. J’ai donc fait mon M2 en Droit du Sport à Nice sous la direction de Pierre COLLOMB et Marc PELTIER.
J’ai ensuite effectué mon stage de M2 à la Ligue de la Méditerranée de football où j’ai été embauché dans la continuité du stage en qualité de juriste, ce qui m’a permis ensuite de participer à la création du service juridique de la Ligue.
En 2014, j’ai été promu directeur administratif et juridique. Afin d’être complètement opérationnel dans mes nouvelles fonctions, j’ai demandé à bénéficier d’une formation pour obtenir récemment un Diplôme d’Etat supérieur de la Jeunesse, de l’Education Populaire et du Sport (DES JEPS) Direction de structures sportives. Une formation mise en place par le CREPS PACA et le CROS PROVENCE ALPES et qui m’a beaucoup apporté.
LPJ – Comment avez-vous été recruté (annonce, candidature spontanée, réseau, intérim…) ?
Raphaël Boutin :
Lors de mon année à Nice, un professeur m’a mis en relation avec Me Eric BORGHINI, qui était alors Président du District de la Cote d’Azur de Football et vice-Président de la Ligue de la Méditerranée. Ce dernier défendait la nécessité de créer un service juridique au sein de la Ligue pour répondre à la judiciarisation du football.
Je l’ai contacté, et le courant est tout de suite passé entre nous. Il m’a permis de faire mon stage à la Ligue, et a suivi mon parcours de juriste stagiaire à directeur.
Aujourd’hui, Me BORGHINI est membre du COMEX de la FFF, Président de la Commission Fédérale des Arbitres, et depuis le 10 septembre, Président de la Ligue de la Méditerranée… Notre lien facilite la relation de travail Président / Directeur.
LPJ – Pouvez-vous nous présenter votre structure ?
Raphaël Boutin :
La Ligue de la Méditerranée de Football est bientôt centenaire puisqu’elle est née en 1920. Elle est composée de cinq Districts et couvre depuis 1980 l’ensemble du territoire de la Région PACA (+ Monaco).
Aujourd’hui, la L.M.F fait partie des 22 Ligues régionales (la réforme territoriale réduira ce nombre à 13 d’ici fin 2016), organes déconcentrés de la Fédération Française de Football (F.F.F), bénéficiant d’une subdélégation de mission de service public.
La Ligue de la Méditerranée de Football est chargée statutairement d’organiser, de développer et de réglementer la pratique du football, sous toutes ses formes.
Concrètement, les activités principales de la Ligue de la Méditerranée de Football sont :
– La délivrance des licences,
– L’organisation des compétitions,
– La formation des cadres, dirigeants et arbitres,
– La détection et l’organisation de stages pour les sélections,
– Le développement de la pratique sous toutes ses formes,
– La structuration des clubs.
En quelques chiffres, la L.M.F c’est :
– + de 111.000 licenciés
– + de 700 clubs
– 21 salariés
– Environ 80 bénévoles actifs
LPJ – Avec autant de salariés, qui assume la fonction managériale et comment ?
Raphaël Boutin :
J’assure le management de l’ensemble du personnel de la Ligue en ma qualité de directeur administratif et juridique. Pour le personnel technique, le management ne s’opère pas de la même manière puisque le directeur technique régional a la responsabilité de la fonction managériale en ce qui concerne les techniciens et j’assure au dessus la gestion des ressources humaines au sens large.
LPJ – Quelles sont les principales missions/activités dont vous avez la charge ?
Raphaël Boutin :
Je suis principalement en charge de la direction de l’Administration Régionale, ce qui implique notamment :
– la gestion du personnel
– la mise en œuvre des mesures d’organisation, de gestion et de contrôle visant à assurer le fonctionnement continu et efficace du personnel, au regard de la politique définie par le Comité de Direction
– la relation permanente avec les organes statutaires internes de la Ligue, avec la Fédération et les Districts, ainsi qu’avec les partenaires extérieurs (publics et privés)
– la suivi du budget, et notamment la constitution des dossiers de subventions, contrats d’objectifs, etc…
J’ai souhaité également conservé la direction juridique lorsque j’ai été promu directeur, ce qui implique un œil attentif sur notre service juridique, et la définition de la stratégie sur les dossiers importants.
Ce sont mes principales missions, mais au niveau d’une Ligue régionale, nous sommes souvent dans le dépassement de fonction, c’est aussi ce qui est passionnant de pouvoir toucher à plusieurs domaines (marketing, communication, nouvelles technologies, etc.).
LPJ – Travaillez-vous seul ou en équipe ? Dans quelle proportion ?
Raphaël Boutin :
Le football est un sport d’équipe. Cela se ressent au niveau de l’administration de la Ligue. De nombreux dossiers sont transverses et nécessitent le travail de plusieurs services. La Ligue étant une association, le travail en équipe se fait également avec les bénévoles.
Néanmoins, il est évident que l’équipe est plus resserrée lorsqu’il s’agit d’exercer les fonctions de direction pure. Pour cela je travaille en collaboration avec mon adjointe.
LPJ – Quel est la place du juridique dans vos activités ?
Raphaël Boutin : Depuis mon passage de responsable juridique de la Ligue à Directeur, il est évident que la place du droit a diminué, et a également changé. Je m’occupais principalement de contentieux disciplinaire et règlementaire au sein du service juridique. Désormais, je suis plus sur des aspects de droit social.
Mais lorsqu’on y réfléchi, le droit n’est jamais loin (droit des associations, responsabilité civile, droit de la formation professionnelle, etc.).
LPJ – Comment se déroule une journée type d’un Directeur Administratif et juridique ?
Raphaël Boutin : Je n’ai pas réellement de journée type car l’activité sportive est par nature fluctuante et il y a plutôt des périodes distinctes d’activité, notamment selon les services (préparation de la saison, délivrance des licences, gestion des compétitions, etc.).
Nous sommes beaucoup dans l’action en fonction des évènements à venir, des problématiques qui se présentent, et des orientations voulues par le Président et son Comité de Direction.
LPJ – Quelles sont les compétences attendues (générales et spécifiques) pour exercer votre métier ?
Raphaël Boutin : En dehors de la parfaite connaissance du fonctionnement des instances et des acteurs du football (des clubs à la fédération), mes fonctions nécessitent beaucoup de rigueur, de capacité d’analyse et de prises d’initiatives. Il faut des compétences en matière de management et de gestion des conflits.
Dans le secteur associatif, il faut également être disponible, sociable et avoir le sens de l’intérêt général.
LPJ – En quoi votre activité professionnelle vous plait elle ?
Raphaël Boutin : J’aime la variété de mes missions et la diversité des projets que nous pouvons mettre en place que ce soit en matière de lutte contre les incivilités, d’insertion professionnelle par le football, de développement de nouveaux outils de communications (application mobile « Foot Méditerranée »).
J’ai toujours eu besoin d’avoir des responsabilités car j’aime ressentir cette pression de devoir atteindre le meilleur résultat possible, et avoir le sentiment de participer à la réussite d’un projet partagé.
J’apprécie également le contact humain qui est permanent dans mon activité, que ce soit avec les bénévoles, mes collaborateurs, les dirigeants de clubs, ou les partenaires institutionnels et privés. C’est extrêmement enrichissant.
LPJ – Un conseil aux jeunes diplômés qui souhaitent suivre vos traces ou s’insérer ?
Raphaël Boutin : Je ne sais pas si j’ai suffisamment d’expérience pour être légitime à donner des conseils aux jeunes diplômés.
Néanmoins je vais réutiliser celui que m’a donné Me BORGHINI lorsque je suis arrivé à la Ligue en tant que stagiaire : « il faut savoir se rendre indispensable ». Ce qui implique d’être constamment à 110 % dans la motivation et la rigueur.
Ensuite, au regard de mon parcours personnel, je crois qu’il est important de se former en permanence si on veut évoluer. Ce n’est pas la fac de droit qui m’a appris les bases de la gestion financière et du management… C’est pourquoi j’ai sollicité la possibilité de suivre le DES JEPS Directeur de structures sportives.
LPJ – Pour conclure, quelle formation conseillerez-vous aux étudiants en droit pour suivre vos traces ?
Raphaël Boutin : « Tous les chemins mènent à Rome… » mais pour être juriste dans le milieu du sport, un M2 en Droit du Sport me semble incontournable.
Ensuite, pour évoluer vers une fonction de direction comme la mienne, il faut connaître ses points faibles et trouver la formation qui les comblera en étoffant le panel de compétences.
Propos recueillis par Paul Messi