Organe international méconnu, le Comité pour l’Élimination de la discrimination à l’égard des Femmes vise à assurer le respect des engagements pris par les États parties à la Convention sur l’Élimination de la discrimination à l’égard des Femmes, communément appelée CEDAW.
Alors que le nouveau gouvernement canadien tente de donner l’exemple avec un gouvernement paritaire, l’existence de discriminations envers les femmes est toujours d’actualité. Une convention visant à prévenir ce type de situation a été mise en place afin de protéger les droits des femmes et de punir toutes violations via la création d’un Comité. Cette protection spécifique vise à ériger les droits des femmes comme un droit fondamental à part entière, même si des ajustements restent encore à faire.
Une protection spécifique du droit des femmes
Si la Déclaration internationale des droits de l’Homme et le pacte international relatifs aux droits civils et politiques prohibent toutes formes de discrimination, la Convention sur l’élimination de toutes formes de discrimination à l’égard des femmes adoptée en 1979 est le premier instrument juridique visant expressément les discriminations faites aux femmes.
Sa spécificité résulte du fait que la notion de discrimination ne se limite pas à celle faite par la loi : la notion prend également en compte les effets de celle-ci sur le statut des femmes. L’article 2 pose également une obligation positive envers les États : ces derniers se doivent de mettre en place des mécanismes pratiques pour lutter contre toutes violations du droit des femmes. Ainsi, les États ont le devoir de remédier aux discriminations issues de pratiques culturelles comme celle des pieds bandés en Chine, mais aussi de prendre des mesures pour améliorer la vie économique et sociale ou pour réparer des injustices passées via des mesures législatives ou encore l’obligation de sanctionner toutes discriminations. De ce fait, même les acteurs privés de la vie économique sont concernés. La Convention prévoit également la mise en place d’un Comité dont le rôle est de vérifier la mise en œuvre des dispositions via la rédaction périodique de rapports ou de recommandations. Les États peuvent également s’adresser à lui pour des questions d’interprétation ou d’application de certaines dispositions. Néanmoins, pendant plus de vingt ans, la Convention ne permettait pas aux individus de saisir le Comité en cas de violation de leurs droits.
Les droits de la femme : des droits humains
Il a fallu attendre la Conférence de Vienne de 1993 et le discours « Women‘s rights are Human Rights » d’Hillary Clinton pour que la position des États évolue sur cette question. Prise dans le contexte de la guerre des Balkans où le viol était souvent utilisé comme arme de guerre, cette décision a mené à la création d’un protocole facultatif ouvrant la voie aux recours individuels. Ainsi, dans l’affaire Goekce contre Autriche du 6 août 2007, la famille d’une femme décédée sous les coups de son compagnon a décidé de poursuivre l’Autriche sur le moyen que les forces de police auraient dû répondre plus rapidement à l’appel au secours de la victime. Le Comité a fini par condamner l’État autrichien au motif que le retard des forces de police constituait un manquement aux obligations imposées à l’Autriche par la Convention. Ainsi, le protocole facultatif a permis d’aller plus loin dans la garantie de l’effectivité de la CEDAW. Toutefois, des limites existent.
Des réticences encore présentes
Si en théorie l’article 28 de la CEDAW dispose qu’aucune réserve contraire à l’objet du traité ne peut être faite, la pratique semble s’écarter de cette règle. En effet, la Convention se caractérise par un nombre assez impressionnant de réserves. Par exemple, l’Égypte a émis une réserve à l’article 16 garantissant l’égalité entre hommes et femmes en matière de divorce. De ce fait, l’État égyptien peut continuer à appliquer la Sharia dans ce domaine, limitant ainsi l’accès au divorce pour de nombreuses femmes. De plus, comme son nom l’indique, le protocole permettant un recours pour les particuliers est un instrument facultatif. Ainsi, les États parties à la Convention ne sont pas obligés de se doter du protocole et peuvent également émettre des réserves limitant le champ de compétence du Comité. A titre d’illustration, la Colombie refuse que le Comité puisse enquêter sur une situation dans un pays qui aurait pu entraîner une violation de la Convention.
Il n’empêche que la CEDAW est un premier pas vers l’égalité des sexes en matière internationale et offre pour les ressortissants des États membres au protocole une alternative pour défendre leurs droits face à des juridictions des Droits de l’Homme toujours plus engorgées.
Thalia Gerzso
Pour en savoir + :
Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes
UN.org -> Women Watch
Bonjour,
Merci pour cet article. Cependant, je note une petite erreur… En effet, le discours d’Hillary Clinton « Women’s Rights Are Human Rights » n’a pas été prononcé lors de la Conférence de Vienne de 1993 mais lors de la 4ème Conférence Mondiale sur les Femmes de l’ONU, le 5 septembre 1995 à Pékin.
Bonne journée 🙂